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Publié par fxg

Escales Caraïbes avec Beethova Obas, Jocelyne Beroard et Sarah-Corinne EmmanuelVibration-sur-scene-a-bastille-photo-A-Jocksan.jpg

Samedi dernier, la Scène Bastille à fait plaisir à des centaines de personnes avec une programmation de qualité et attendue : un concert, trois prestations avec Jocelyne Beroard, Sarah-Corinne Emmanuel et Beethova Obas. Un haut du plateau artistique des Caraïbes choisi par Patrick Marie-Joseph et son équipe pour fêter ses deux de live.  Le public a répondu présent massivement pour la première de la chanteuse de Kassav dans une petite salle parisienne. On ne pouvait même plus compter le nombre d’appareils photo sortis des sacs dès lors qu’elle est apparue sur la scène. Emotion et admiration pouvaient se lire dans les regards.

Charlie-trio-photo-A--Jocksan.jpgTout a débuté par une petite mise en bouche avec le groupe de la Martinique, Charlie Trio, composé de Francis Joseph-Rose à la basse, Félix Clarion à la guitare et le leader Charlie Labinsky aux batterie/percussions. Ils existent depuis 2008 et ont profité de leur passage à Paris, sur la route du Jura où ils vont être en résidence d’artiste, jusqu’au 11 novembre. Leur premier album sortira en 2012. Un style propre, une sonorité séduisante, swing, assez originale, rythmée aux airs de nos campagnes, un bélé original, funky.

Jean-Jacques-Seba--Sarah-Corinne-Emmanuel-et-Marie-Celine-.jpgPuis, c’est la mise en place de l’orchestre, sans surprise. On prend les mêmes et pourquoi changer un groupe gagnant avec Albert aux percussions, Bellon à la batterie, Philippe au synthé, Mickaël et Yvon pour les guitares. Aux chœurs Marie-Céline Chroné et Jean-Jacques. Les ingrédients du succès  sont en place. La grande Sarah-Corinne Emmanuel chauffe sa voix en coulisse avant d’apparaître, vêtue d’un jaune soleil qui fait oublier le froid extérieur. Elle est sublime, provocante, sensuelle, parfois dérangeante. Sa voix cristallise le public qui boit ses paroles diffuses pour mieux la pénétrer et vibrer avec elle. Elle porte en elle force et puissance. Cette Sarah-Corinne chante la vie, dans un mélange théâtral peu commun. Le blues de son quotidien, le respect  de la femme, de son corps et l’union pour vaincre ensemble l’amour pur. Le chemin de mémoire de Sarah-Corinne Emmanuel dans son blues créole est envoûtant, prenant et porte l’espoir. Elle chante avec ses tripes la douleur d’une mère souffrante prête à tout pour sauver sa progéniture. Elle  lance au public en le fixant : «  Les matadors, ces femmes, ces putes étaient nos mères ! . Ça déménage.

Jocelyne-et-Beethovas-photo-A-Jocksan.jpgIl est 21h15 le gaucher haïtien, Beethova Obas prend le témoin. Quelques problèmes techniques l’obligent à emprunter la guitare d’un droitier, celle d’Yvon, pour entonner Ti papa, le titre en vogue de son dernier opus. Il explique : « Ti papa, dites vous bien que le monde va mal. Ti papa est un dirigeant qui n’arrive pas à assumer. Je suis haïtien, vous comprenez ce que je veux vous dire. Chez moi, il y a des ti-papas. Mais, faites attention il y en a partout ! ». Place à l’ambiance, à la vibration des cordes de la guitare qui donne la chair de poule, c’est beau. C’est un pro et rien ne l’arrête. Il a le sens du rythme et du travail bien fait. La musique d’Obas transporte au-delà des océans. Chez lui tout est couleur café même le duo qu’il interprète avec la diva martiniquaise, Jocelyne Béroard, d’après un texte de Patrick Chamoiseau, sur  une mélodie de Fred Désir. Ils nous emportent vers l’ailleurs, vers son pays, Haïti. Sa guitare est revenue juste avant qu’il ne chante avec elle. La salle est en liesse. La chaleur monte et prédit ce que nous attend après. Mettre le feu. Pour Beethova, Jocelyne est un monument et le public répond en chœur : « Oui ! »

Jocelyne-5-photo-Alfred-Jocksan.jpg22 h 09, voilà l’étoile attendue qui traverse le podium, cheveux au vent, micro et sourire aux lèvres. La salle est explosive… Tonnerre d’applaudissements. Jocelyne dynamite la salle ; le public explose et reprend en chœur toutes ses chansons. Elle, toute heureuse, fait cette déclaration à la salle :  « C’est que je me trouve heureuse avec les Escales  caraibes… Je suis vraiment très heureuse d’être là ce soir. Je peux vous voir et voir aussi ces amis-là que j’aime beaucoup et qui ont énormément de talent. Mwen contan, bayo on lamin, ban mwen ! » PSE plane aussi avec elle. Il n’est pas oublié. Il ne faut surtout pas compter sur elle pour laisser dans l’oubli son compagnon de Kassav. Une résonance d’amour se conjugue à l’infini avec les voix de la salle. Puis, une  belle surprise… Oriane arrive pour chanter en duo une de ses plus belles chansons, Siwo. Moment magique. Les voix s’envolent. Oriane entonne avec plaisir les paroles et la foule répond en harmonie, mais étonnée. Et, à la fin comme un seul l’homme, des voix sonnent un gros « j’ t’aime ». Comme elle dit souvent : « Yin ki lammou. »il-y-a-du-plaisir-en-musique-photo-A-Jocksan.jpg

Un concert, trois artistes, un orchestre… Escales Caraïbes. Depuis deux ans, le concept a séduit les Parisiens qui demandent après chaque concert la date du suivant…Oriane-et-Jocelyne-en-duo--photo-A-Jocksan.jpg

Alfred Jocksan (textes et photos)


Beethovas Obas, l’intellectuel de la guitare haïtienne

Beethovas-Obas-5-photo-A--Jocksan.jpg« Je suis heureux de voir que le public suit encore malgré les difficultés techniques que nous avons eu au début.  J’ai eu le plaisir de faire découvrir deux morceaux de mon dernier album, le duo avec Jocelyne Béroard  et Ti-papa qui est le titre phare du disque. Le public a bien réagi. Aujourd’hui, je vis bien de ma musique. Je suis heureusement connu dans une très grande partie du monde, notamment aux USA, Haïti, aux Antilles, en France. Même quand on ne m’attend pas, je suis toujours en tournée. Nous avons un grand nombre d’haïtiens qui vivent aux Etats Unis. Je repars la semaine prochaine. J’ai déjà sept dates, entre Washington, Boston et New-York. Je suis heureux de pouvoir vivre de ce métier que j’aime bien et qui m’a choisi. Moi, je n’ai pas étudié la musique, j’ai étudié l’administration. Je devais me retrouver en train de gérer les millions  de ces actionnaires, de ces marionnettistes qui sont derrière et qu’on  n’arrive pas à voir et qui détiennent le monopole économique de la planète. Je devais me retrouver là. Je ne sais pas qui a fait quoi. C’est une guitare que j’ai en main et une voix faible. Une voix qui a besoin d’autres pour l’aider. Je suis heureux de pouvoir transmettre cette  vibration que je reçois. Je suis un capteur d’énergie et si je ne reçois pas d’énergie, je ne vais pas émettre. Donc, j’émets quand je reçois. »


Sarah-Corinne Emmanuel  comédienne–chanteuse (grande présence scénique)

Sarah-Corinne-Emmanuel-2-photo-A-Jocksan.jpg« C’était magnifique, grandiose. J’ai vécu quelque chose de magique, ce moment quand j’ai pu parler des femmes, de nous, êtres humains dans la Caraïbe. Des hommes et des femmes rassemblés pour que nous formions ensemble le futur de demain… A partir de mes observations que j’ai faites  par rapport aux contes de mon pays, surtout pendant les veillées mortuaires, j’ai inventé un mode théâtral qui passe de la chanson au texte. Et moi il m’importait de parler de la femme, de parler de l’homme de la Caraibe et la possibilité, l’avenir que nous avons ensemble pour nous construire. Nous devons nous arranger pour nous reconnaître ensemble, pour reconnaître notre devenir, notre potentialité, et assurer le futur de nos enfants. »


Patrick-Marie-Joseph-une-vie-de-musique-photo-A-Jocksan.jpgPatrick Marie-Joseph, concepteur des Escales Caraïbes.

Comment vivez-vous ces instants ?

Je les vis pleinement. La musique, j’en ai fait mon métier à 40 ans. C’était quelque chose de mûrement réfléchies. Je ne regrette pas ; je prends mon pied tous les jours.

Avec le recul, pouvez-vous nous dire si vous croyiez à la réussite de ce concept au départ ?

Dans ma tête, j’étais sûr qu’il fallait du temps pour que les choses s’installent. Il faut qu’on se sente en confiance et que les gens se sentent chez eux, qu’ils se disent : Enfin ! Ce sont nos artistes, je peux les toucher, je peux les voir de très près et leur parler.  Oui, ça valait le coup !

Y a-t-il une demande pour voir évoluer les artistes dans des petites salles en live ?

La biguine, la mazurka ont vécu des moments de gloire dans la capitale, à Paris. Ça n’a jamais cessé. Et ça ne cessera jamais.

Quels sont vos objectifs ?

Je veux continuer à œuvrer pour la musique que je défends. La musique traditionnelle des Antilles. Dieu seul sait si le combat est difficile. Mais, je ne suis pas de ceux qui baissent les bras facilement. Je poursuis mon chemin. Il y a ceux qui me lâchent, d’autres qui continuent le chemin avec moi. Le plus important est de continuer son chemin. Si on pouvait tenir jusqu’à dix ans, ça nous arrangerait.

Propos recueillis par Alfred Jocksan

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