Chyco Simeon au Sunset
Siméon slappe Ozanam
Chyco Siméon est né à Talence près de Bordeaux d’une mère martiniquaise des Terres Sainville et d’un père guadeloupéen de Capesterre-Belle-Eau. A 14 ans, il vient vivre à Fort-de-France, puis à Ozanam (Schoelcher). Son père, mélomane, lui a appris à écouter « toutes les musiques », du classique au jazz en passant par la musique locale, mais sa préférence va d’abord au hard rock et au funk. Il se lance dans l’apprentissage de la basse, joue avec Tony Chasseur et Pipo Gertrude. Il n’a alors que 15 ans et se lance dans une carrière de piano bar. Il devient rapidement, le premier bassiste de studio de la Martinique avec Jean-Michel Mariolo et José Zébina. Il réalise aussi pour Franck Donatien l’album Krystal. A partir de 1986, il compose et produit avec Georges Debs pour divers artistes que ce soit dans la musique antillaise, la variété française ou dans le jazz. Chyco sort deux albums au service de son jeu de basse comme lead, Finally en 2004 avec des invités de renom tels que Marcus Miller et Roots Mwen en 2006. Il présente son 3e album produit chez Aztec, Ozanam, au Sunset (60, rue des Lombards à Paris 1er), ce samedi 8 mai. Interview
« Aux Etats-Unis, on a appelé ma musique caribean urban jazz »
Quelle est la couleur musicale de ce nouvel album ?
C’est l’artiste qui se confirme de plus en plus, qui creuse encore plus son trou dans son style. J’ai attendu dix ans pour faire le premier album et j’ai tout lâché. Le deuxième était plus précis, entre le jazz, le funk et la Caraïbe. Je suis le mélange de tout ça. Et le troisième… Aux Etats-Unis, on a appelé ma musique caribean urban jazz.
Le titre de l’album, Ozanam, est une référence à ce quartier de Schoelcher où vous avez vécu ?
Où ma mère vit toujours… Il y a beaucoup d’histoire dans ce quartier. C’est riche en situation et il y a plusieurs couches sociales. On voit un peu tout et c’est ce que j’ai eu envie de raconter.
Est-ce que vous chantez dans cet album ?
Non, je ne chante pas. C’est surtout la basse qui fait les leads ce qui est peu courant en France et encore plus aux Antilles.… Sur un titre je chante, mais je ne suis pas chanteur. Là, je raconte mon côté caribéen, mon côté fusion. Humainement comme musicalement.
On vous prête une relation particulière avec Marcus Miller. Pouvez-vous nous en parler ?
On s’est connu il y a quinze ans. C’est un ami qui m’a piégé… il m’avait demandé de le déposer devant un hôtel pour qu’il voit sa tante. En fait, il avait appris que Marcus était dans cet hôtel et il a voulu provoquer la rencontre. Mon ami avait préparé tous mes enregistrements et lui a fait passer. Deuxième piège ! Marcus Miller a écouté et après il m’a rappelé… On est devenu ami et il est même le parrain de mon fils.
Avez-vous joué ensemble ?
On a déjà fait un ou deux sons ensemble mais très intimement. C’est impressionnant d’être à côté de Marcus Miller qui est un grand et qui reste aussi simple. Mais honnêtement, au niveau basse, on a très peu parlé.
Qu’est-ce qu’il vous a dit de votre musique ?
Au moment de mon premier album, il m’a dit que s’il ne jouait pas dedans, on ne serait plus ami (Rires). Je pense qu’il apprécie ce que je fais. Il m’a toujours soutenu.
Votre jeu de basse, si vous deviez le définir…
Je suis très sensible au son et j’ai beaucoup travaillé mon slap pour que ce ne soit pas un slap juste occasionnel. La plupart du temps, je fais les mélodies en slap, donc il faut que ça soit clair. Au départ, quand je regarde ma basse, je fais en sorte qu’elle soit très cool avec moi (rires)… Il faut quand même qu’elle raconte tout ce que mon cerveau essaie de retransmettre par mes doigts… Mais forcément il y a une fusion et il y a un moment où je ne sais plus qui est la basse, qui est moi. On ne fait qu’un, un moment. On raconte les histoires ensemble.
Ce concert parisien est la première présentation de l’album au public… Qui vous accompagne ?
Il y a eu un premier set en public lors du festival Carib in Jazz en janvier. Je joue avec Arnaud Dolmen, un batteur très prometteur. Thibaud Dufois au clavier. Olivier Juste aux percus. Et à la trompette, mon acolyte depuis 2003, Fred Delbecq.
Comment vous inscrivez-vous par rapport aux nouvelles musiques créoles, comme KKoustik ou Soft ?
Je ne suis pas dans la même démarche même si ,j’appuie à fond la leur. La mienne n’est pas aussi ciblée, franche que pour eux. Peut-être parce que je suis plus un mélange, parce que je suis un négropolitain qui a vécu une période rock, une autre funk, une autre jazz, une autre zouk… J’essaie vraiment de faire une synthèse de ce que je suis. Dans la synthèse, il y a forcément une partie qui se rapproche d’eux mais ma musique en général est plus béton, plus cité, plus urbaine.
Comment les Etats-Unis ont influencé votre musique ?
Je n’y ai pas vécu mais j’y ai séjourné plusieurs fois. Il y a une chose qui m’a fascinée chez eux… Quand on est ailleurs, on les regarde d’en bas, mais quand ils sont avec nous, on se rend compte qu’on est à la même hauteur et on a parfois l’impression que ce sont eux qui se mettent plus bas… Onb se sent à l’aise, du coup. On n’a pas ces a priori de peur car ils sont vraiment très simples.
Ils sont ouverts à ces musiques caribéennes ?
La funk est partie de Saint-Louis ; Saint-Louis est partie des Créoles ; les Créoles sont partis des Caraïbes. On a une très grosse influence dans la musique noire américaine. Je me souviens au cours d’un festival à Toronto, il y a plus de vingt ans, avec José Zébina, on était dans un magasin d’instruments de musique. José a joué tous les plans jazz funk et personne ne se retournait. Dès qu’il a tapé une biguine, tout le monde s’est retourné ! Les artistes Américains sont très curieux.
A quand la tournée aux Antilles et en Guyane ?
Il faut encore tout caler, mais c’est prévu. Je serai au festival de l’Atrium en Martinique dès qu’on en connaîtra les dates. Et dans les trois mois qui viennent je serai présent car ma musique est bien accueillie ici et je me dois de montrer que je porte un intérêt particulier à mes racines.
Propos recueillis par FXG (agence de presse GHM)