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Publié par fxg

Interview Nicolas Sarkozy, président de la République

Dans l’interview exclusive qu’il a accordée hier au bloguer pour les titres du Groupe Hersant Média (et particulièrement France-Guyane et France-Antilles), Nicolas Sarkozy, président de la République, qui recevait hier après-midi à l’Elysée les présidents des conseils régionaux et généraux de Guyane et Martinique, annonce les dates des référendums dans ces départements en vue d’une évolution institutionnelle et confirme pour autant qu’il n’est pas question d’indépendance.

 « La Martinique et la Guyane sont françaises et le resteront »

Quand auront lieu les consultations populaires en Martinique et Guyane ?

Nicolas Sarkozy Les élus de Martinique et de la Guyane ont demandé à exercer davantage de responsabilités en organisant leur collectivité selon le régime prévu par l’article 74 de la Constitution. Je leur ai annoncé que je procéderai à une consultation directe des Martiniquais et des Guyanais sur ce sujet. Après avoir longuement échangé avec eux, j’ai décidé de convoquer les électeurs de la Martinique et de la Guyane le 17 janvier prochain et, le cas échéant, le 24 janvier.

Vous le voyez, je n’ai qu’une parole. J’ai toujours dit que j’étais ouvert à la question de l’évolution institutionnelle, pour autant qu’elle soit au service d’un projet. Aujourd’hui, je transforme ces paroles en acte car j’estime que le contexte politique et social l’exige.

C’est votre réponse principale à la crise qui a secoué les Antilles au début de l’année…

Après la crise de confiance qui a traversé une partie de l’outre-mer, le statuquo n’est, à mon sens, pas souhaitable. L’évolution statutaire des territoires qui le souhaitent n’est, bien entendu, qu’une facette de la refondation des relations entre la métropole et l’outre-mer. Il s’agit néanmoins d’un point fondamental.

Je souhaite profondément que nous puissions instaurer une relation nouvelle, basée sur le sens des responsabilités de chacun, sur le respect et la confiance réciproques.

Quelles seront les questions qui seront posées aux citoyens de ces territoires ?

Comme je l’ai dit, lors de mon discours à l’aéroport Aimé Césaire en Martinique, le 26 juin dernier, je souhaite que les Martiniquais, mais aussi les Guyanais, aient un véritable choix démocratique. C’est la raison pour laquelle, comme la Constitution m’y autorise, j’ai décidé de poser deux questions successives.

Pour être concret, les Martiniquais et les Guyanais se verront, lors d’une première consultation, proposer d’approuver la transformation de leur territoire en une collectivité régie par l’article 74 de la Constitution, et donc dotée d’une organisation particulière en créant une collectivité unique et en lui transférant des compétences nouvelles qui ne peuvent pas être exercées dans le cadre de l’article 73 de la Constitution.

S’il est répondu « oui » à cette question, nous en resterons là et nous travaillerons, sans délai, à la mise en place de la nouvelle collectivité.

Toutefois, un « non » au passage à l’article 74 ne signifie pas forcément une volonté de rester dans le statu quo. C’est pourquoi, dans cette hypothèse et dans celle-ci seulement, les électeurs seront appelés le dimanche suivant à approuver ou à rejeter la création d’une collectivité unique qui exercerait les compétences du Conseil Régional et du Conseil général, tout en demeurant dans le régime actuel de l’article 73 .

Quelle est la préférence du président de la République ?

Je n’ai, pour ma part, pas de préférence à faire valoir. Les deux hypothèses ont leurs avantages et leurs inconvénients. Je demande simplement à chacun de s’engager dans un débat démocratique digne de l’enjeu, qui permette aux électeurs d’opérer un choix éclairé et responsable.

Je ne laisserai personne caricaturer le débat et je redis, à cet égard, que les questions posées ne portent en rien sur l’indépendance. La Martinique et la Guyane ont toute leur place dans la République et, quel que soit le choix qui sera fait par nos concitoyens, il sera respectable. La Martinique et la Guyane sont françaises et le resteront. Je m’en porte garant.

La restitution nationale des États généraux de l’Outre-mer que vous avez lancés en février dernier, doit servir de base à l’ordre du jour du premier Conseil interministériel de l’Outre-mer. D’ores et déjà, y a-t-il des points qui vous paraissent incontournables ?

Les États généraux ont été, par leur ampleur et leur richesse, à la hauteur de nos attentes. Il en ressort de nombreuses réflexions et des centaines de propositions qu’un seul Conseil interministériel ne suffira pas à traiter. Aussi, faut-il considérer ce premier « Conseil interministériel de l’outre-mer » de l’Histoire, que je présiderai, comme une étape et non comme une fin. Ce qui est important, c’est que chaque membre du gouvernement se sente directement concerné par les sujets ultramarins qui ne doivent pas être traités exclusivement par le ministère en charge de l’outre-mer. Le fait de dire que chacun de nos territoires fait partie intégrante de la République a un sens.

Sur quoi pensez-vous agir ?

Sur le fond, nos réflexions principales portent sur plusieurs axes : le renforcement de la concurrence dans le secteur privé, le développement et la structuration des filières de production locale, la modification des règles de gouvernance, la meilleure insertion des territoires dans leur environnement régional ou encore l’amélioration concrète de l’égalité des chances. Sur tous ces sujets, je ferai des annonces concrètes qui seront directement inspirées du travail réalisé par tous ceux qui sont impliqués dans les États généraux de l’outre-mer ces derniers mois. Je sais que ça n’a pas toujours été facile et qu’il a fallu, parfois, une dose de courage pour participer à une démarche que certains se plaisaient à présenter comme « ficelée depuis le début ». Ceux-là verront bien, le moment venu, combien cette analyse était erronée. Il est toujours facile de dénoncer les situations et de demander aux uns et aux autres de régler tous les problèmes. Il est bien moins aisé de construire un projet commun et partagé, de participer à une démarche constructive où le travail remplace la vindicte. C’est pourquoi je veux remercier ceux qui se sont engagés dans ce sens.

Quand aura lieu ce Conseil interministériel et à quoi doit-il donner lieu ?

Je réunirai, avec le Premier ministre, les membres du Gouvernement, le vendredi 6 novembre prochain, pour délibérer et arrêter une série de premières mesures. Le soir même, je convierai, à l’Élysée, tous les élus de l’outre-mer, ainsi que des représentants de la société civile et du monde économique. Je m’exprimerai, à cette occasion, devant eux.

Vous le voyez, l’Etat est entièrement mobilisé pour l’outre-mer et je ne peux pas laisser dire que le Gouvernement actuel considèrerait ce sujet comme étant « secondaire ». En vérité, jamais nous n’avons autant fait pour la France d’outre-mer. Et je considère d’ailleurs cela comme normal.

Ce qui a changé, c’est que nous avons un discours franc et direct. La force de proposition, la constance dans les engagements et le refus de la démagogie sont encore, à mes yeux, les preuves les plus authentiques de ce qui vous tient à cœur par-dessus tout : le respect.

Propos recueillis par François-Xavier Guillerm, agence de presse GHM


Ils ont dit

Alain Tien Liong, président du conseil général de Guyane

Etes-vous satisfait de ces annonces ?

Tout à fait ! C’est une demande que nous avons depuis dix ans, qui a été zappée par le gouvernement socialiste de Lionel Jospin. Donc nous sommes satisfaits aujourd’hui de la réponse favorable du président de la République à notre demande de consultation populaire sur la base de l’article 74. Maintenant, à l’initiative du président, une deuxième question sera posée en cas d’échec à la première et nous prenons acte de cette deuxième question. Le président a avancé comme mobile la nécessité de ne pas rester dans le statu quo. Mais en ce qui nous concerne, nous ne pouvons pas nous prononcer déjà sur cette deuxième question dans la mesure où notre demande était une consultation sur la base du 74.

Pour lequel vous mènerez campagne…

C’est sur cette base là que nous allons mener campagne sans présager de ce que sera la réponse de la population.

Comment interprétez-vous le plan B proposé par le président ?

On ne peut pas rester dans le statu quo et le président de la République l’a lui-même compris. Il pourrait ne pas nous demander notre avis, c’est de sa prérogative mais nous sommes sur la même longueur d’onde et pour notre part, il s’agit de constater déjà qu’il a tenu compte de notre demande.

Que pensez-vous du maintien des régionales en mars 2010 ?

Il ne me gène pas, maintenant quelque soit la réponse à la question posée, il y aura une modification du contexte actuel. Cela nécessitera à un moment donné que le gouvernement puisse annoncer que les conseillers régionaux qui seront élus ne pourront pas mener leur mandat à terme. Que nous allions vers le 74 ou une collectivité unique, il y aura modification par rapport à l’existant. Le mandat des conseillers ne pourra donc excéder plus de deux ou trois ans.


Antoine Karam, président de Région Guyane

Etes-vous satisfait des ces annonces ?

Nous sommes satisfaits. Le président est resté dans l’esprit de sa déclaration du 19 février 2009, a        u cœur de la crise et de cette déclaration qui a été confortée, confirmée, le 26 juin à Fort-de-France, lors de l’inauguration de l’aéroport Aimé-Césaire. Le président de la République a respecté sa parole et dans un climat de confiance, nous allons nous préparer à cette échéance importante pour nous, celle des référendums qui se dérouleront les 17 et 24 janvier 2010. Nos assemblées réunis en congrès ont milité pour une évolution dans le cadre de l’article 74. Au cas où il n’y aurait pas d’accord sur la première question, huit jours plus tard, on devra se prononcer sur une transformation en collectivité unique dans le cadre de l’article 73 adapté de la Constitution. Nous considérons que la démocratie a été respectée et que le peuple, dans sa souveraineté, va trancher sur une question que nous nous posons depuis des années en Guyane.

Ce processus en deux temps vous convient-il ?

Nous allons militer pour le premier processus mais nous respectons le choix et la décision du président de la République. Nous avions toujours dit que le président de la République était maître de son choix et aussi maître du calendrier. Maintenant, à nous de convaincre nos compatriotes de la justesse du combat que nous voulons mener pour son avenir.

Le président vous a-t-il donné l’impression d’avoir une préférence pour une formule ou l’autre ?

Pas du tout ! Le président doit rester au-dessus mais il a dit que la pire des choses pour nous serait de rester dans le statu quo.

Peut-on parler de consensus ?

Il y a un consensus car il y a eu compréhension et accord sur ce que nous avons proposé et qui a été repris par le président de la République parce qu’il a vu qu’à une très large majorité dans nos Congrès, nous avons adopté un certain nombre de principes que nous allons faire vivre avec le peuple de Guyane.


Alfred Marie-Jeanne, président de la Région Martinique

L’heure de nous-mêmes a-t-elle enfin sonné ?

C’est une question ? (sourires)… En tout cas je peux dire que l’heure des changements est venue et, en ce sens, je vois que le président de la République respecte ses engagements puisque non seulement il va répondre à notre attente et consulter le peuple de Martinique, mais il a également décidé de nous écouter en renvoyant à la fin du mois de janvier cette consultation. Troisièmement, il n’est pas question d’expérimentation ! Nous ne sommes pas des apprentis qu’on a renvoyés de l’école. Quatrièmement, il a décidé de poser d’abord une question sur une gestion autonome de la Martinique. Il a bien précisé qu’au cas où il n’y aurait pas un succès, alors il poserait une question, dans le cadre de l’article 73, pour une collectivité unique. C’est sa proposition. Bien sûr la deuxième question n’est pas la nôtre mais c’est ensemble que nous avons construit tout ça, donc j’espère que c’est une marche en avant particulièrement positive.

Que se passera-t-il pour les régionales ?

Les régionales se feront en mars 2010, sur le même modèle en attendant que les choses se mettent en place.

Reste plus qu’à faire campagne. Quels seront vos principaux arguments ?

Vous les connaissez ! L’article 73 ne répond plus dans les temps modernes que nous vivons à ce que l’on peut escompter. Il faut plus d’initiatives pour régler un certain nombre de problèmes qui nous assaillent, nous tiennent à la gorge. Je crois que tout le monde, sauf ceux qui sont de mauvaise foi, font la même analyse que nous et le président de la République lui-même a dit lors de sa venue en Martinique qu’il n’y aurait pas de statu quo. Il est donc d’accord pour un changement au moins égal à la création d’une collectivité mais la réponse appartient au peuple. C’est lui qui choisira entre l’optima et l’extrême minima.


Claude Lise, président du conseil général de la Martinique

L’heure de nous même a-t-elle enfin sonné ?

Rires francs… Il y a à peu près cinquante ans qu’Aimé Césaire a lancé ce fameux cri : « L’heure de nous-mêmes a sonné », mais je constate que certains continuent à somnoler tranquillement, ils doivent penser que c’est mieux de continuer à se reposer et que le matin arrive trop tôt !

Vous êtes donc satisfait ?

Oui parce que nous souhaitions une concertation dans la clarté, la démocratie. Il fallait un minimum de temps, nous l’avons obtenu. Il n’y a qu’une question qui sera posée le 17 janvier sur le passage sous le régime de l’article 74. Donc, là c’est clair ! Le président a proposé pour le cas que nous ne souhaitons pas, une réponse négative à la question du 17 janvier, qu’il y ait une session de rattrapage le dimanche suivant où il proposerait une consultation sur une collectivité unique qui remplacerait département et région. Nous considérons que c’est de sa responsabilité puisqu’il a dit très clairement que le statu quo était insupportable et nuisible au développement.

Ce plan B ne vous dérange-t-il pas ?

Il ne peut nous gêner quoique nous nous battions pour le plan A ! Je comprends que le président de la République, dans ses responsabilités vis-à-à-vis des citoyens prévoit un plan B. Mais nous, nous ne sommes pas demandeurs de ce plan B !

Le non de 2003 n’est-il pas encore dans la tête des gens ?

Je ne sais pas s’il est dans la tête des Martiniquais, mais je pense qu’il faut surtout extirper certaines mauvaises habitudes dans la tête de certains élus qui ne prennent pas la voie de la responsabilité. Ce qui importe c’est que les électeurs veulent un débat clair, de qualité pour choisir en toute connaissance de cause. Je suis convaincu que si tel est le cas, ils choisiront ce qui les conduit sur la route de la responsabilité et du développement.


Marie-Luce Penchard, secrétaire d'Etat à l'outre-mer

« Il fallait faire les choses très simplement et bien dissocier la consultation par rapport au 74 et poser la question de la collectivité unique si, effectivement, il n’y avait pas un vote favorable sur le 74. Le président a rappelé aussi que tout en ayant un attachement fort de ces territoires au sein de la République, il est évident qu’on ne peut pas gérer la Martinique et la Guyane de la même manière que la Lozère ou les Hauts-de-Seine et qu’il a le souci d’avoir un meilleur statut qui corresponde à ces territoires pour leur permettre un développement économique. Ce que je veux souligner c’est que ça s’est passé dans un climat de confiance et que les quatre présidents sont sortis très satisfaits de la décision prise. La date des élections régionales est maintenue. Toutes ces questions ont été vues. On est vraiment sur une solution très consensuelle. »

 

 

 

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