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Publié par fxg

Les politiques publiques culturelles dans les Outre-mer

Coline-Toumson-Pascale-Goetshel-Georges-Bredent.jpgLa semaine dernière, la cité de l’Immigration (palais de la Porte dorée à Paris) a accueilli un colloque organisée par l’historienne Pascale Goetschel, Caroline Bourgine du commissariat de l’année de l’outre-mer, Julie Verlaine et Anna Trespeuch. Il s’agissait de réfléchir à la façon dont sont apparues et se sont développées les politiques culturelles en outre-mer. Si l’histoire des politiques culturelles françaises depuis 1959 est désormais bien connue, si des recherches se développent aujourd'hui autour d'une étude comparée des politiques culturelles internationales, des zones d’ombre demeurent en matière d'applications pratiques des politiques culturelles, notamment dans l'espace ultramarin. Les implications culturelles de la départementalisation, et plus encore les expériences et les initiatives antérieures, souvent proliférantes, sont largement méconnues. De profonds décalages existent entre la création de structures et d'organismes en métropole et leur implantation dans les DOM. La notion  même  de culture  ne peut être posée sans tenir compte d’une histoire spécifique aux citoyens des outre-mer et de la quête d’une identité culturelle propre. « La politique culturelle du ministère est en décalage car elle est marquée par le centralisme et le paternalisme », constatait le conseiller régional de la Guadeloupe, Georges Brédent. Ce sont les collectivités locales qui, avec peu de moyens, se sont investies pour donner leur propre vision sur leur territoire, en phase avec leur population. »

Entre préservation d'un patrimoine et valorisation de la création, les participants se sont interrogés sur la définition et le sens de l'expression « politiques culturelles  » appliquée aux départements d'outre-mer en tentant d’identifier les prémices, de repérer les moments d'émergence et les rythmes, d'en observer les acteurs principaux et les manifestations saillantes, d'en comprendre les enjeux passés et contemporains. Jusqu’aux débats et conflits auxquels ont pu donner lieu ces politiques culturelles. « Les identités ont été de plus en plus prises en considération, remarque Juliana Rimane, conseillère générale de Guyane. Il faut maintenant des politiques publiques qui mettent en valeur cette identité et surtout pour que ces identités sortent de leur territoire et que ses potentialités arrivent sur la scène nationale. » Daniel Maximin, commissaire de l'année des Outre-mer français, Priska Degras (université Paris IV), Jacques Dumont (Université Antilles-Guyane) et Françoise Blum (CNRS) ont évoqué l’émergence des modèles à l’heure de la décolonisation et de la départementalisation (des années 1940 aux années 1960). Pour aborder les initiatives locales et les premières structurations (des années 1960 aux années 1980), Jean-Paul et Ina Césaire sont venus parler de la politique culturelle à Fort-de-France, Ghislaine Gadjard (ancien conseiller pour le théâtre et l’action culturelle au ministère de la Culture) a témoigné du « bouillonnement culturel » des années 1970-1985. Carpanin Marimoutou (université de la Réunion) a parlé des mouvements culturels réunionnais et des luttes pour les cultures vernaculaires des années 1970 à aujourd'hui. Danielle Bégot (Université Antilles-Guyane), Alain Foix (ancien directeur  de la scène nationale de la Guadeloupe), Fanny Auguiac (ancienne directrice du Centre  martiniquais d’Action Culturelle) et Marie-Jo Lo-Thong (direction des affaires culturelles océan Indien) ont évoqué la question de l’aménagement du territoire et de l’action culturelle (des années 1980 aux années 2000). Enfin, Fred Constant (a     ncien directeur régional des affaires culturelles de la Martinique), Céline Delaval (directrice des affaires culturelles, mairie de Saint-Laurent du Maroni), André  Delpuech (conservateur  en chef du Patrimoine, musée du Quai Branly), Laurella Rinçon (direction générale des patrimoines, ministère de la Culture) et Françoise Vergès  (Consulting Professor au Goldsmiths College de Londres) ont conclu sur le présent avec les enjeux et débats contemporains.

FXG (agence de presse GHM)

 


Interview Pascale Goetschel, maître de conférence à Paris 1 au centre d’histoire sociale du XXe siècle

19-mars-2012-2836.JPG« Les premières politiques publiques culturelles sont le fait des collectivités »

Un colloque sur les politiques publiques culturelles en outre-mer, pourquoi ?

Ce qui nous a intéressés, c’étaient les perspectives historiques. On cherchait à définir les politiques culturelles en essayant de comprendre à quel moment ça avait émergé, quels acteurs étaient impliqués, quels ont été les moments d’innovation ou éventuellement de repli, de reniement… On a cherché à faire surgir des chronologies, des enjeux et jusqu’à la prospective.

Qu’est-ce qui est ressorti de ces tables rondes ?

On a pu voir qu’il y avait une élite bourgeoise qui avait émergé dans les années 1930. Ce qui est moins connu, c’est après guerre, dans les années 1950, il y a beaucoup d’associations d’éducation populaire, sportives, culturelles qui sont un terreau favorable. Le Parti communiste a joué un rôle en même temps que les associations de jeunesse… L’autre moment, c’est le bouillonnement des années 1970. Guislaine Gadjar est venue témoigner sur le moment où Jean-Marie Serrault est venu en Guadeloupe, où Ariane Mnouchkine, en 1972, est venu jouer 1789. a ce moment-là, c’est la politique culturelle de Pointe-à-Pitre, des communes et un Etat qui était très peu présent. On a parlé du Centre Réunionnais d’action culturelle qui date de 1968, qui aurait dû être une maison de la Culture… On attend toujours !

Que faut-il déduire de ce bouillonnement ?

C’est la montée en puissance des mouvements autour des traditions, du maloya par exemple. On sent très bien que lorsque le premier DRAC de la Réunion arrive en 1981, il n’est pas sur cette ligne-là.

Mais pouvait-on alors parler de politiques culturelles ?

En soi, elles n’existent pas. On peut les définir de manière abstraite par les sciences politiques, mais ce sont les gens qui les définissent en faisant les choses. La politique culturelle du festival de Pointe-à-Pitre n’est pas la même que celle qui va être mise en place dans les DRAC qui vont apparaître très tardivement. Alors qu’elles sont installées en 1977 dans l’Hexagone, elles ne sont installées qu’en 1981 à la Réunion, 1984 à la Martinique, 1989 à la Guadeloupe et 1992 en Guyane.

A partir de quand peut-on parler de politiques publiques culturelles dans les DOM ?

Elles ne commencent pas avec l’implantation de l’Etat et des structures déconcentrées telles qu’on les connaît mais avec les politiques multiples liées parfois à la jeunesse et au sport qui sont le fait des communes, des départements et plus tard, des régions. Quand le Conseil général de la Guadeloupe, en 1993, lance sa politique culturelle, même si c’est balbutiant, c’est une politique culturelle.

Et quid des politiques culturelles actuelles ?

Un représentant du ministère de la Culture est venu présenter le plan Outre-mer. Ce qui est très intéressant, c’est le décalage avec tout ce qui a été dit par les acteurs locaux.

Un plan jacobin ?

Un plan technocrate.

Propos recueillis par FXG (agence de presse GHM)

 

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