Budget Outre-mer : défisc, exos de charges, DGF et continuité territoriale
Christian Eckert (budget) et George Pau-Langevin (Outre-mer) ont répondu aux questions des députés mardi soir pendant plus de trois heures, mardi soir en commission élargie
Débat budgétaire animé mardi soir à l'Assemblée
Malgré la perte de 75 millions d'euros sur les exonérations de charge et les inquiétudes de certains sur l'avenir de la défiscalisation, George Pau-Langevin et son collègue du Budget, Christian Eckert ont obtenu un feu vert de l'Assemblée hier soir, y compris du rapporteur LR Patrick Ollier.
Christian Eckert, secrétaire d'Etat au Budger, et George Pau-Langevin sont venus défendre le budget de la mission outre-mer hier soir devant la commission élargie de l'Assemblée nationale. Si le budget est stable par rapport, à l'an dernier, il y a quelques modifications notables à commencer par le recentrage sur les bas et moyens salaires des exonérations de charges sociales à hauteur de 75 millions d'euros malgré un CICE porté à 9 %. Pour le rapporteur de la commission économique, Patrick Ollier (LR), ce coup de rabot va sortir 10 000 salariés du dispositif et 41 000 autres seraient moins exonérés. Daniel Gibbs, le seul député ultramarin LR, est venu lui apporter son soutien, mais quand les critiques sont aussi venues des bancs de la gauche, la ministre n'a pu s'empêcher de le faire remarquer !
Huguette Bello (GDR Réunion) a déclaré que ce recentrage n'était "pas compris", Patrick Lebreton (SRC Réunion) a mis en opposition le "décalage entre les annonces et le budget proposé"... Serge Létchimy (SRC Martinique) a parlé de "choix risqué pour les besoins d'encadrement et de risque de trappe à bas salaire"... La ministre leur a expliqué que les exonérations de charge concerneraient les personnels des TPE/PME de moins de onze salariés pourvu qu'ils gagnent de 1,4 à 2,3 SMIC. Pour les autres entreprises, cela ne concernerait que ceux qui gagnent 1,3 SMIC. En revanche, le secteur exposé à la concurrence aura son CICE renforcé dès le 1er janvier 2016 (comme le CICE à 9 %). La baisse des cotisations familiales n'interviendra qu'à compter du 1er avril.
CBQB, CSBQB, CBBQB...
Si les articles relatifs à la défisc et aux crédits d'impôts ne seront examinés qu'à la mi-novembre, les parlementaires ont bataillé sur le sujet. C'est l'après 2017 qui a fait débat. Patrick Ollier a indiqué qu'il allait déposer un amendement pour prolonger le dispositif actuel de défisc jusqu'en 2025. Le député Serge Letchimy a plaidé pour 2022. Christian Eckert a précisé "la position commune" des deux ministres : "Je confirme la volonté du gouvernement d'étendre le crédit d'impôt pour donner de la visibilité et de la durée aux entreprises en prolongeant le crédit d'impôt jusqu'en 2020. Une date qui correspond à la fin de l'actuel règlement européen d'exemption par catégorie. On ne peut pas aller au-delà malgré la souplesse qu'on peut mettre dans l'application du RGEC." Reste que quand Victorin Lurel (SRC Guadeloupe) a demandé à ce que la Banque publique d'investissement préfinance le crédit d'impôt, Christian Eckert a avoué que la BPI n'avait pas encore trouvé le moyen d'intervenir : "Le coût n'est pas gigantesque, c'est l'affaire de quelques millions d'euros, pas plus de 10..." Il a encore insisté sur le fait que le taux du crédit d'impôt (40 %) était plus favorable que celui de la défiscalisation (33 à 35 %). GPL a trouvé utile de rappeler que la loi de défiscalisation Girardin votée pour quinze ans avait remise en cause au bout de trois ans...
Mais ce débat autour de la défiscalisation a provoqué un petit clash avec Christian Eckert qui a jeté un acronyme aux députés : "CBCQ... C'est Bercy qui bloque" pour rappeler que ce n'est justement pas toujours Bercy qui bloque. "CSBQB, a rétorqué Ericka Bareigts (SRC Réunion), c'est souvent Bercy qui bloque !" Patrick Lebreton en a remis une couche en balançant à son tour : "CBBQB, C'est bien Bercy qui bloque !" Il a fini en demandant si le plan logement outremer était toujours à l'ordre du jour... Quand au député Jean-Jacques Vlody (SRC Réunion), il en a profité pour s'en prendre à tous les adversaires de la défisc : "Elle n'est pas une échappatoire pour des gens qui ont de l'argent, mais un soutien aux entreprises." Quant au Martiniquais (GDR) Alfred Marie-Jeanne, il en a profité pour dénoncer les escroqueries et arnaques à la défisc...
Le budget outre-mer sera voté en séance publique le 3 novembre.
FXG, à Paris
Dotation globale de fonctionnement
Cette dotation de l'Etat aux collectivités locales est critiquée car elle est globalement en baisse. Vicroin Lurel est venu dire qu'il fallait "parfaire le dispositif en faveur des Outre-mer. Il y a des écarts qui s'agrandissent." Eckert n'a pas partagé le point de vue de son ancien collègue : "L'évolution de la DGF tient compte des spécificités des collectivités. Sur les 112 communes d'outre-mer, 91 communes gagnent globalement 16,4 millions d'euros, soit en moyenne 150 000 euros de plus chacune."
Continuité territoriale
L'aide à la continuité territoriale voit son enveloppe en hausse de 1,3 millions à 33,6 millions. Huguette Bello en a profité pour demander à GPL ce que devenait les 5 millions dévolus à la Réunion maintenant que seuls 5 % en sont utilisés depuis la réforme de la continuité territoriale l'an passé...
La continuité territoriale s'enrichit d'une aide à la continuité funéraire avec un soutien aux personnes endeuillées et au rapatriement des corps qui s'appliquera aussi dans les COM de Saint-Martin, Saint-Barth et du Pacifique. Chantal Berthelot (SRC Guyane) a fait savoir sa satisfaction tout en demandant qu'on lui précise les modalités et le calendrier de cette aide nouvelle.
Réaction de la FEDOM
La FEDOM a pris acte de l’annonce de la prolongation de l’aide fiscale à l’investissement dès le PLF 2016, "jusque fin 2020". Si la FEDOM se félicite de cette prolongation, qui résulte d’une volonté de donner de la visibilité aux entreprises ultramarines, elle rappelle toutefois que prolonger seulement jusqu’en 2020 est insuffisant pour les grands projets structurants, qui nécessitent quatre à cinq années de démarches.
Sur le crédit d'impôt "progressivement étendu à l'ensemble des entreprises" et au logement social, la FEDOM sera très vigilante sur ces dispositifs et notamment les préfinancements.
La FEDOM prend donc acte des avancées, mais reste vigilante sur les garanties qui seront apportées pour que les dispositifs mis en oeuvre soient réellement accessibles aux entreprises.