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Publié par fxg

Goscinny-Charbonnier.JPGAnne Goscinny, la fille de René, est présidente de la société d'édition IMAV. Elle publie en collaboration avec la société de Florent Charbonnier, Caraïbédition, quatre nouvelles traductions des Aventures du Petit Nicolas en créoles réunionnais, martiniquais, guadeloupéen et guyanais. Interview.

"Le créole n'a pas besoin du Petit Nicolas alors que lui a besoin des langues qu'on lui offre !"

Goscinny-Guyane.JPGDans quelles circonstances, René Goscinny a-t-il créé avec Jean-Jacques Sempé, Les Aventures du Petit Nicolas ?

Le personnage du Petit Nicolas avait été imaginé par Jean-Jacques Sempé, mais il l'avait très peu utilisé. Quelques temps plus tard, le patron de Sud-Ouest a demandé à Sempé des histoires courtes. Sempé s'est alors tourné vers mon père et ils ont eu envie de faire quelque chose avec le petit Nicolas et sa bande de copains.

Qu'est-ce qui fait l'intérêt de ce personnage ?

Ti Nikola a Kréyol GwiyanéLe Petit Nicolas est un amalgame de tous les enfants. On peut dire qu'il a un genre d'enfance universelle qui tourne autour de deux pôles : l'école et les parents. Le Petit Nicolas est né le 25 mars 1959, mais aujourd'hui, c'est pareil. On remplacerait juste l'encrier par une tablette, mais il reste le fond avec le héros, ses copains, l'institutrice et ses parents. C'est une oeuvre indémodable car elle n'a jamais été à la mode. Le Petit Nicolas est un être non caractérisé, non défini dans lequel chaque enfant, pourvu qu'il ait une vraie enfance, peut se retrouver. C'est le personnage de mon père dont je me sentais le plus proche dans mon enfance. Aujourd'hui, je me sens plus proche de sa mère qui passe sa vie dans la cuisine à faire des gâteaux, que l'on bouscule, qui fait tout pour tout le monde...

Goscinny-Reunion.JPGComment est née l'idée de cette traduction dans les quatre créoles ?

Le Petit Nicolas est déjà traduit en breton, corse, picard, en arabe maghrébin, en latin et même en yiddish. Je trouve qu'il est juste de faire parler le Petit Nicolas dans les langues que l'on parle ou qu'on a parlé en France. Le Yiddish, c'est la langue à laquelle je tiens le plus car c'est la langue maternelle de mon père. Son père était polonais et sa mère ukrainienne. J'ai porté autant d'attention à cette langue qui coule dans mon sang qu'aux autres. La traduction est la seule manière de décliner Le Petit Nicolas, mais pas de l'accroître. En général, le lecteur qui vient lire une traduction en langue régionale l'a déjà lu en français. La traduction permet de confirmer un public déjà touché.

Comment s'est fait le lien avec Caraïbédition ?

Ti-Nikola--Kreyol-Matinik.JPGLes personnages de mon père sont déjà traduits dans 130 langues et cet éditeur a déjà traduit Astérix, Titeuf, Le Petit prince, Tintin... C'est ce qui nous a donné envie de travailler avec lui. C'est compliqué à mettre en place et j'en suis très fière. Le créole vient enrichir de son vocabulaire, son champ lexical, Le Petit Nicolas. La langue enrichit le personnage. Le créole n'a pas besoin du Petit Nicolas alors que lui a besoin des langues qu'on lui offre ! Je ne comprends pas le créole, mais ça m'émeut. C'est une langue douce, tendre...

Est-ce une traduction ou une adaptation ?

Giscinny-Guadeloupe.JPGC'est une traduction, même si traduire, c'est adapter. Le problème de la traduction est plus important avec Astérix. Je dirai même que traduire Astérix est le paroxysme du problème ! Comment traduire en créole ou autre "faut pas parler sèchement à un Numide" ? Mon père qui a vécu neuf ans à New York et vingt en Argentine, supervisait lui-même les traductions en anglais et en espagnol. Pour les autres langues, on fait confiance à notre co-éditeur. On y est obligé, y compris et surtout pour l'analyse des marchés régionaux. On aimerait pouvoir sortir Le Petit,Nicolas dans les 75 langues régionales. Ca ferait une chouette collection intellectuellement ! Le prochain sera en nissart, la langue de ma mère, et moi j'aimerai bien le traduire en argot.

Ti-nikola-Kreol-la-Renion.JPGQuel rapport a pu avoir votre père avec les Outre-mer ?

Mon père est mort à 51 ans, quand j'avais 9 ans et je n'ai pas de souvenir d'un voyage à la Réunion ou aux Antilles. Mes souvenirs de voyage, c'est en Argentine. Sa vie se partageait entre la France et l'Argentine. Nous partions l'été en Argentine où c'était l'hiver et nous revenions l'hiver en France. Pendant très longtemps, on n'a pas connu l'été  !

Et vous-même, connaissez-vous l'outre-mer ?

Je suis allée à Saint-Gilles, à la Réunion, et j'en garde un souvenir ébloui ! En en parlant, je me téléporterai volontiers. J'ai été frappée par la gentillesse des gens.

Propos recueillis par FXG, à Paris

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