Détournement de pouvoir au CNMHE
Un très cher poste de secrétaire général
le gouvernement a été condamné pour détournement de pouvoir, le 19 janvier dernier pour avoir recasé un obligé au CNMHE. Le CNMHE, créé en 2005 pour piloter les politiques publiques mémorielles sur les crimes de l'esclavage et de la traite négrière, est composé d'historiens et d'entrepreneurs de mémoire. Ils sont tous bénévoles tandis que le secrétaire général est le seul rémunéré à hauteur de 6000 euros par mois. En janvier 2014, le ministre des Outre-mer, Victorin Lurel, met fin au CDD de Frédéric Lazorthes, secrétaire général du CNMHE nommé en 2009 par Yves Jégo, et installe à sa place Angèle Louviers, une avocate d'origine antillaise, militante PS qui a animé le réseau des soutiens ultramarins du candidat François Hollande.
Frédéric Lazorthes attaque en juin 2015 au tribunal administratif de Paris et obtient l'annulation de son licenciement et de la nomination de Mme Louviers. "La nouvelle orientation donnée au comité, se défend le gouvernement, supposait de renforcer les liens avec le monde culturel et médiatique ultramarin et donc de donner une nouvelle dimension au poste de secrétaire général (...) Mme Louviers est originaire d’outre-mer, contrairement à M. Lazorthes". "Cela ne saurait, selon le juge administratif, justifier le non renouvellement du contrat de M. Lazorthes et son remplacement par Mme Louviers." L'arrêt ordonne au ministre de l’Intérieur de "statuer à nouveau sur l’éventualité d’un renouvellement du contrat de M. Lazorthes dans un délai de trois mois." Avant même la fin de ce délai, le 18 septembre 2016, apprenant que M. Lazorthes fait appel pour obtenir des réparations financières, la nouvelle ministre des Outre-mer, George Pau-Langevin, nomme au poste de secrétaire général du CNMHE le préfet et directeur général de l'Outre-mer, Alain Rousseau, et crée un poste de chargé de mission qui échoit à Mme Louviers qui devient directrice de la programmation et de l’animation. Le ministère pense ainsi avoir évacué le problème Lazorthes. Mais celui-ci, têtu, attaque ces nouvelles nominations. Un nouveau jugement en date du 19 janvier 2017 annule la nomination du préfet Rousseau qu'il n'estime pas justifiée selon le compte-rendu d’une réunion de la DGOM du 18 août 2015 : « M. Lazorthes vient d'interjeter appel pour obtenir des réparations financières. Il faut proposer au DGOM un arrêté nommant ce dernier secrétaire général du CNMHE. »
La nomination du préfet Rousseau a donc bien pour objet de justifier le rejet de la demande de M. Lazorthes dont le tribunal administratif avait ordonné le réexamen". Le juge conclut : "L’arrêté du 18 septembre 2016 doit être annulé pour détournement de pouvoir." Ce qui signifie que le ministère a usé de ses pouvoirs pour un objet autre que celui à raison desquels ils lui étaient confiés. Une décision rarissime. Le ministère des Outre-mer a fait appel de ce jugement. Dans la foulée, le 15 février dernier, l'Elysée a évacué le préfet Rousseau en le nommant membre du Conseil supérieur de l’appui territorial et de l’évaluation, et nommé Corinne Orzechowski, jusque-là préfète de la Sarthe (!), nouvelle directrice générale des outre-mer.
FXG, à Paris