Les Assises de l'Outre-mer selon Emmanuel Macron
Economie et formation professionnelle au coeur des assises
Dans son discours de lancement des assises des Outre-mer à Cayenne, samedi dernier, le président de la République a longuement développé la philosophie des ambitions que sa ministre aura à coordonner.
A travers son discours, il a anticipé la réponse des critiques des parlementaires sur son premier budget...
"Je crois à l'investissement dans des filières économiques, aux aides aux entreprises pour baisser le coût du travail et à une politique de formation et d'insertion." Emmanuel Macron veut faire de la commande publique le levier du développement de filières locales avec "des critères d'emplois locaux, des critères sociaux, même des critères environnementaux" et bien sûr en "simplifiant les règles". Et tandis que les parlementaires ont pointé la "désanctuarisation" de la ligne budgétaire unique (qui sert à financer le logement social), le président a dit ce qu'il entendait faire pour le BTP et le logement : "Son financement sera stabilisé sur la durée du quinquennat." Il a ainsi annoncé qu'un projet de loi logement serait présenté avant la fin de l'année avec un chapitre outre-mer.
Le président plaide encore pour la modernisation des infrastructures touristiques : "L'Etat, la Caisse des Depôts et Consignations doivent venir en soutien dans une stratégie qui a commencé à se déployer pour l'Hexagone et qui a trop largement oublié les Outre-mer ".
Le président assure encore que la commande publique participera aussi à structurer la filière énergétique et renouvelable, à réduire les délais de réalisation et adapter la programmation pluriannuelle énergétique (PPE) aux réalités des territoires.
Même pragmatisme avec la filière agricole et agroalimentaire où il veut, partout, augmenter la production et la consommation locale, notamment à la Martinique et à la Guadeloupe où le taux de dépendance alimentaire est supérieur à 60% voire 80% dans certains endroits. Le président suggère de développer des stratégies de culture polyvalente "pour construire une vraie souveraineté alimentaire de nos Outre-mer qui sera un des facteurs de la lutte contre la vie chère." Pour cela, Emmanuel Macron recommande une stratégie de formation des jeunes pour répondre aux besoins locaux.
Formation et mobilité
Le président compte "transformer la politique de formation sur les territoires pour éviter d'imposer des milliers de kilomètres aux uns et aux autres". C'est le début de l'explication de la suppression de 13 % du budget de Ladom dans le budget en cours d'examen. Le président rappelle d'abord qu'il va investir 15 milliards pendant ce quinquennat pour l'action en matière de formation et d'éducation. Mais il veut aussi que l'on "repense profondément l'aide à la mobilité". Ce sujet sera au cœur des assises notamment à la Guadeloupe et la Martinique : "Nous devons développer des formations aux Antilles pour réussir dans les filières qui sont adaptées. Et ça vaut aussi pour la Guyane (...) Il est complètement fou de voir aujourd'hui des jeunes qui vont aller chercher des formations qualifiantes en Hexagone pour des besoins en emplois sur les territoires !" Le projet présidentiel est donc d'investir sue part de ces 15 milliards dans la formation et de diminuer de 10 à 15 % chaque année le budget de Ladom, soit 50 % en cinq ans. Il s'en explique ainsi : "Ce n’est pas de la dépense de fonctionnement, c'est de l'investissement d'avoir des formations de qualité..."
Emmanuel Macron veut non seulement éviter les départs, mais il veut également "accompagner sur le plan tarifaire les retours". Il en est ainsi de l'initiative de la Région Réunion qui finance 100 000 billets par an. "Je veux que l’Etat puisse être non seulement à vos côtés mais aux côtés de toutes les collectivités pour là aussi développer ces facilités."
Au-delà des grands sujets régaliens (justice, sécurité, santé), le président a insisté sur "l'esprit de responsabilité (qui) doit être partagé par tout sur chaque once de ce territoire parce que le combat que quelques-uns d'entre vous menez, c'est un combat digne, fort, il est plus dur que de s'habituer aux facilités passées."
Churchill concluait un semblable discours en promettant du sang, de la sueur et des larmes !
FXG, à Paris
Les ateliers évoqués
Fonction publique
Un chantier sera ouvert avec le directeur général de la fonction publique Thierry LE GOFF avec les organisations syndicales et les DRH des ministères. Emmanuel Macron a rappelé son engagement à ne pas toucher aux 40 % de sur-rémunération, mais cette position aura "à terme vocation à bouger". Pour autant, le président est prêt pour "une vraie politique d'attractivité (...) en valorisant la carrière de nos concitoyens ultramarins là où ils sont nés" afin que "la fonction publique d'Etat ressemble aux territoires qu'elle administre". Pour cela, il veut des filières d'excellence. Là aussi des conclusions sont attendues pour l'été.
Collectivités publiques
Emmanuel Macron s'engage pour maintenir les dotations des 319 collectivités publiques territoriales sur la durée du quinquennat. En échange de quoi, il leur demande une profonde restructuration ("investir davantage et peut-être de dépenser moins en fonctionnement"). Cela aussi doit faire l'objet d'un chantier.
Erasmus régional
Le président a indiqué avoir "poussé l'Union européenne en ayant un Erasmus adapté". Un dispositif qui permettrait aux jeunes guyanais d'aller faire des échanges universitaires au Brésil, en Colombie ; les Réunionnais, à Madagascar ou en Afrique et les Antillais dans la Caraïbe
Un statut international des lieux de naissance
Le chef de l'Etat a indiqué être "prêt à réfléchir à un statut international des lieux de naissance et des zones frontalières" sans remettre en causel'aide médicale d'Etat. Il a ainsi voulu aborder la question de l'attractivité de nos territoires avec leurs structures de santé et la question du droit du sol... Il invite aussi à bâtir une coopération en matière de santé avec les Comores, "pour éviter un tourisme sanitaire qui conduit ensuite à des installations dans la durée". Une ligne valable également pour la Guyane, voire Saint-Martin.
Congés bonifiés et billets d'avion
"Les congés bonifiés tels qu'ils fonctionnent aujourd'hui ne sont plus adaptés à un temps où il fallait prendre le bateau durant des mois pour rejoindre sa famille." Le président propose de permettre des retours plus fréquents et une politique de billets d'avion beaucoup moins chers. "Aujourd'hui, a-t-il dénoncé, c'est un système d'entente en quelque sorte sur le dos des personnes et des finances de l'Etat, où on fait payer plusieurs milliers d'euros de plus le billet d'avion à celui qui revient pour son congé bonifié..." Il propose donc une politique de concurrence "beaucoup plus vigilante pour les monopoles dans chacun de nos territoires, (...) comme pour les compagnies aériennes et leur politique tarifaire."