Les élus d'outre-mer et les assises des Outre-mer
Réunion agitée autour des assises et des aides économiques
Parmi l'une des nombreuses réunions tenues récemment au ministère des Outre-mer, celle du 17 avril, dédiée aux assises des Outre-mer et à la réforme des aides économiques, a duré 4 heures.
C'était pour les élus, parlementaires ou chefs d'exécutif, territoriaux, l'occasion d'y voir un peu plus clair sur la politique que prépare le gouvernement pour le reste du quinquennat à partir de l'année 2019.

Thierry Bert, le grand coordinateur des assises des Outre-mer, entouré d'une partie de l'équipe projet ultramarin (Audrey Pulvar, Nassir Goulamaly, Joelle Prévot-Madère...) s'est livré à une présentation de la "dernière étape des assises des outre-mer". Ce qui se dégage de l'ensemble des consultations, selon M. Bert, c'est le financement de l'entrepreneuriat, la conquête ou la reconquête de l'autonomie alimentaire, l'accélération de la mise en place d'un écosystème numérique ("C'est techno, a-t-il commenté, mais je ne peux pas m'en empêcher"), l'accélération de la transition énergétique (il a parlé d'une mission en cours sur le développement de véhicules électriques), le développement du tourisme maritime et culturel ("le tourisme n'est pas une panacée, a pontifié le haut fonctionnaire, mais il faut une stratégie") et encore la volonté des chambres consulaires de mettre un coup d'accélérateur sur l'apprentissage et la formation professionnelle. Il a cité trois projets "ponctuels mais de grande ampleur" : les mobilités, la gestion de l'eau et celle des déchets. D'autres "de plus petites dimensions, mais de grand intérêt" : tourisme, mobilité, culture, santé, personnes âgées. Enfin des mesures transversales comme la défiscalisation et la création de zones franches, l'adaptation de certaines règles dans le domaine de l'environnement et l'adaptation des normes et des aides dans le domaine du logement. Enfin, l'équipe projet ultramarin a reçu 1000 projets qui seront accessibles en ligne. Dans chaque territoire, le préfet proposera aux collectivités de co-piloter leur suivi et leur accompagnement en fonction des priorités choisies.
Premiers échanges vifs avec les élus
"S'agit-il de 1000 projets publiés ou 1000 projets financés ?", demandent la sénatrice Victoire Jasmin (PS Guadeloupe) et le député Serge Létchimy (Nouvelle gauche, Martinique). "Et l'accord de Guyane ?", demande le sénateur Georges Patient (LREM Guyane). "Quels sont les financements nouveaux pour la loi égalité réelle outre-mer ?", reprend Serge Létchimy très remonté qui s'interroge sur le fil conducteur des projets et la différenciation des territoires... "Cela prend il en compte le rattrapage, le grand plan d'investissement, le fonds exceptionnel d'investissement, les contrats de plan Etat Région ?"
La sénatrice Nassimah Dindar (UDI Réunion) félicite le rapporteur Bert et salue les nombreux projets déposés. Le président Chalus (Région Guadeloupe) fait beaucoup de phrases pour dire qu'il a besoin de concret ! Le député Olivier Serva (LREM Guadeloupe) reste lisse mais demande aussi du concret. Le député Thierry Robert (Modem Réunion) s'interroge à l'instar de son collègue Létchimy sur la mise en oeuvre de la loi égalité réelle outre-mer... Le député Jean-Hugues Ratenon (FI Réunion) se tait, consterné. Les sénateurs Lagourgue (LR Réunion) et Dennemont (LREM Réunion) se taisent aussi. L'intervention d'Alfred Marie-Jeanne, président de la collectivité de Martinique, est peu audible. Tous les préfets sont là, de même les conseillers du Premier ministre et du président Macron. Annick Girardin répond aux uns et aux autres. Elle indique que les mesures pour Mayotte seront fixées à la mi-mai. Elle insiste pour dire qu'il n'y a jamais eu autant de voyages officiels de ministres dans les Outre-mer et que, peut-être, il n' y a pas assez d'habilitation, d'accompagnement et d'ingénierie...
Les aides économiques
Deuxième point de la réunion, la réforme des aides économiques. Premier constat : les dispositifs sont trop peu ciblés vers les entreprises ouvertes à la concurrence. Il est envisagé des modifications paramétriques pour les aides fiscales à l'investissement productif ou plus fondamentales sur les exonérations de charge sociales. L'empilement des dispositifs zonés est trop peu lisible pour assurer l'attractivité des territoires. Le soutien à la capitalisation est atrophié.
La réforme veut rendre l'environnement des affaires, attractifs, compétitifs et performants, des fonctions d'intervention nouvelle pour le développement, l'ingénierie et le financement et enfin une ligne de développement clair dans l'économie bleue, verte, numérique, touristique, agricole et productive.
Serge Létchimy se félicite de cette "discussion positive et à développer". Olivier Serva pose la question des délais de paiement des collectivités, des exonérations de charge dans certains secteurs et des indicateurs au sein des plans de convergence. La députée Nadia Ramassamy (LR Réunion) demande la liste de toutes les aides économiques en détail mais la ministre a mis tellement de temps à lui répondre qu'elle est partie sans entendre la réponse. Le député David Lorion (LR Réunion) se plaint de n'avoir pas été invité au groupe de travail sur les aides économiques. Il souligne la nécessité de mieux cibler les aides pour regagner de la compétitivité tout en se montrant dubitatif : "On critique l'empilement des aides, mais ça n'a pas si mal fonctionné quand on observe le taux de croissance en 2017 !" Rodolphe Alexandre, président de la collectivité territoriale de Guyane, regrette lui aussi l'absence de concertation et de consultation, mais surtout, il et s'inquiète de la baisse de dotation venant de l'Union européenne... Yolaine Costes, vice-président de la Région Réunion s'inquiète elle de la visibilité de ces aides dans le temps et de l'efficacité des zones franches "Les zones franches zéro impôt, lui répond la ministre, je n'y crois pas ; les zones franches ciblées, oui !"
Arrive alors Victorin Lurel (PS Guadeloupe). Il n'y a plus de place autour de la table. On l'invite à s'assoir avec les collaborateurs. Que nenni ! Le sénateur Lurel prend une chaise qu'il pose en bord de table. Annick Girardin achève de répondre aux élus, assure que les réunions sont ouvertes à tous, que la défiscalisation ira jusqu'en 2025 ou 2030. Enfin, elle clôt la réunion. Lurel frappe alors la main su la table et exige la parole. Il rappelle que la loi égalité réelle outre-mer a fixé la date butoir du 1er juillet pour les plans de convergence de même qu'elle prévoit un rapport du gouvernement sur les dispositifs fiscaux. "Nous allons devoir nous contenter de l'expertise faite pas Bercy !", regrette-t-il avant de s'inquiéter sur les dispositifs ciblés et la Guyane : "Le programme de stabilité ne prévoit rien pour pour la Guyane !" Victorin Lurel achève son intervention dans une saillie pleine de menaces : "J'ai appelé à voter Macron au second tour, maintenant, je vous le dis : si vous continuez, vous irez à l'affrontement !"
Le directeur adjoint de cabinet, Brice Blondel, ancien conseiller de Victorin Lurel quand il était ministre des Outre-mer, prend la parole : "M. Le ministre, ce ministère a d'autres priorités que de faire des rapports aux parlementaires !"
Avant que Victorin ne s'étrangle, Annick Girardin l'invite à la suivre dans son bureau ministériel pour tâcher de mettre un siwo miel dans tout ça !
FXG, à Paris
Les assises en chiffres
8200 participants aux réunions publiques, 12 000 aux consultations numériques, 50 ateliers organisés, 30 articles sur le blog des Assises...
Calendrier
Le 16 mai, Thierry Bert remettra son rapport bâti sur le fondement des consultations. Il s'agira d'une série de priorités et de propositions avec une "stratégie cohérente de transformation et d'avenir déclinée par territoire par thèmes et par filière." En annexe, il y aura les projets, priorités et stratégies territoriales.
En juin, une réunion interministérielle sera consacrée aux Outre-mer avant l'adoption définitive du livre bleu outre-mer et sa remise au président dans la semaine du 20 au 27 juin. Ce livre bleu outre-mer nourrira les plans et contrats de convergence prévus par la loi égalité réelle Outre-mer. Les plans devront donner une vision des territoires sur vingt ans contre cinq pour les contrats. Prévus à la signature au 1er juillet, ils ne seront vraisemblablement pas signés avant la fin de l'été.
Les aides actuelles : 2,5 milliards
TVA NPR : 100 millions
Aides fiscales à l'investissement productif : 415 millions
Crédits d'impôt recherche et innovation : 15 millions
Exo de charges : 1,25 milliard
CICE : 500 millions
Aides au fret : 5 millions
FIP DOM : non communiqué
Zones franches d'activité : 115 millions
Zone de revitalisation rurale : 3 millions
Zones franches d'exportation : 40 millions