La mortalité infantile repart à la hausse en France et deux fois plus aux Antilles
La mortalité infantile recommence à croitre en France, surtout outre-mer
Une étude récente coordonnée par le pédiatre et épidémiologiste Martin Chalumeau de l’INSERM, a fait grand bruit lors de sa publication le 1er mars dernier dans The Lancet. Elle révéle une « augmentation significative » du taux de mortalité infantile en France depuis l’année 2012, alors que cet indicateur ne cessait de décroitre depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. La France est ainsi passée à la 27ᵉ place dans le classement de l’OCDE, ex æquo avec la Pologne, alors qu’en 1989, elle était 9ᵉ, juste derrière l’Allemagne. Les chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’Université de Paris, de l’AP-HP et du CHU de Nantes, en collaboration avec des équipes de l’Université de Californie, ont analysé les données d’état civil de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) entre 2001 et 2019 pour conclure à cette hausse de 7 %. On comptait 3,32 décès pour 1000 naissances en 2012. On est arrivé à un ratio de 3,56 pour mille en 2019.
« En comparant les données par rapport à d’autres pays européens à économie similaire tels que la Suède et la Finlande, on observe chaque année en France un excès d’environ 1200 décès d’enfants âgés de moins d’un an », explique le professeur Martin Chalumeau. Un travail au sein de l’Inserm est en cours pour analyser les causes de cette hausse de la mortalité infantile, mais selon les données de l’INSEE relatives aux enfants nés entre 2018 et 2020 et morts au cours de leur première année de vie, c’est aux Antilles, à la Réunion et en Seine-Saint-Denis (93) que l’on retrouve les taux les plus élevés. La Seine-Saint-Denis bat le record avec un taux de 5,3 décès pour mille naissances, la Martinique et la Guadeloupe connaissent des taux deux fois plus élevés que dans le reste du pays. « On peut affirmer que le lieu de naissance a une influence sur la mortalité infantile », a déclaré à la revue Reporterre Magali Barbieri, démographe à l’Institut national des études démographiques (Ined). On soupçonne bien entendu un lien de causalité entre de tels taux et la pauvreté et la précarité, mais également avec les politiques de santé publique : 338 maternités sur 835 ont été fermées entre 1997 et 2019 en France. « Éloigner les maternités du domicile, indique Gérard-François Dumont, démographe et enseignant chercheur à la Sorbonne, c’est prendre le risque d’avoir des accouchements en urgence, ce qui peut se traduire malheureusement par la mort de bébés qui n’aurait pas eu lieu dans une situation normale. » On laissera à part la Guyane et Mayotte où les chiffres sont gonflés par les nombreuses femmes surinamiennes et comoriennes qui viennent accoucher après un voyage souvent périlleux.
FXG