Cour des comptes et communes des DOM
Situation financière préoccupante pour les communes des DOM
Jacques Brana, conseiller référendaire, Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, Franc-Gilbert Banquey, président de la formation interjuridiction et président de la chambre régionale d'Aquitaine, Pierre Calvet, rapporteur général de la formation interjuridiction. (Photos : FXG)
Pour la première fois, la Cour des comptes consacre un rapport à l’ensemble des 112 communes des quatre DOM historiques (Martinique, Guadeloupe, Réunion, Guyane). Le rapport note d’abord des comptes à la sincérité insuffisante (surtout en Guadeloupe et en Guyane). On minore les restes à réaliser en dépenses, on majore ceux à réaliser en recettes, on omet de rattacher les charges et les produits à l’exercice budgétaire. Le nombre de saisines préfectorales a bien diminué (notamment à la Martinique et à la Réunion), mais il y a une vraie dégradation des comptes. Hausse des charges de fonctionnement (dû à l’accroissement de l’emploi public que les maires justifient comme « amortisseur social »), croissance modérée et plus instable des recettes (le rapport de l’octroi de mer a chuté entre 2008 et 2009 de 14 % à la Guadeloupe, 20 % à la Martinique et 11 % à la Réunion, tout comme la part du FRDE touchée par les communes est tombée à zéro en 2009)… Tout cela fait qu’au final, la moitié des communes des DOM, une fois remboursée l’annuité de leur dette, n’ont plus de capacité d’autofinancement. L’octroi de mer sert à 90 % à payer les charges de fonctionnement, c’est-à-dire d’abord les emplois. Or, les recrutements et titularisations sont souvent non conformes.L’investissement public en est réduit à la portion congrue (sauf à la Réunion). En revanche, les communes (sauf encore à la Réunion) sont peu endettées mais c’est d’abord parce que leur capacité d’endettement est limitée… Celles qui sont endettées sont taxées d’insolvabilité chronique telle Roura en Guyane. L’aide de l’Etat semble efficace mais attribuée selon des critères variables. Le principe des aides sous forme de prêts par l’AFD exclut, de fait, les communes à insolvabilité chronique. Sur l’ensemble des avis de toutes les chambres régionales des comptes, 25 % concernent les DOM.
FXG (agence de presse GHM)
Crise de pilotage à Saint-Denis de la Réunion
En 1999, Saint-Denis confie à une SEM la rénovation du centre-ville. Coût estimé 22,6 M€ dont ‘,5 M€ de part communale. Après neuf avenants dont un qui étend l’opération à la ZAC Pôle océan, la part de la ville atteint 36,4 M€. Dix ans plus tard, en août 2009, la ville de Saint-Demis reprend l’opération à son compte Le coût total de la convention publique non achevée s’est élevé finalement à 106,8 M€ avec 83,6 à la charge de la commune. Pour faire face, elle a emprunté 34 M€, augmentant sa dette de 25 %.
Roura (Guyane) : vingt ans de tutelle de la CRC
Roura en guyane, commune de 3 000 habitants, est sous tutelle de la chambre des comptes depuis 1992. Le déficit de &,52 M€ en 1997 était de 8,3 M€ fin 2008, soit 222 % de recettes de fonctionnement ! Poursuivant sa fuite en avant, l a commune a voté son budget 2010 avec un déficit de 10,5 M€. Sa capacité d’autofinancement est négative depuis 2003. « Des investissements hasardeux et de mauvaises méthodes de gestion ont contribué à l’insolvabilité de la commune. »
Explosion de l’emploi public à Saint-Louis de la Réunion
En 2009, le déficit de Saint-Louis (50 000 habitants) atteint 11 M€. LA chambre régionale des comptes identifie la rasion : les dépenses de personnel ont explosé de 72 % entre 2005 et 2009 et elles captent 76,5 % des dépenses de fonctionnement. La mairie a tenté de faire financer ces dépenses de fonctionnement par la section d’investissement, notamment l’emprunt…
Les "choix discrétionnaires" de l’Etat pour les plans de redressement financier
La ville de Fort-de-France (972) s’est vue refuser en 2009 un protocole de redressement au motif qu’elle n’était pas sous observation de la CRC. Pourtant Kourou (973) en a bénéficié en 2008, en présentant les mêmes conditions… En Guadeloupe, 8 communes ont signé un contrat d’objectif communal d’aide à la restructuration et au développement (Cocarde) : Sainte-Rose, Goyave, Petit-Bourg, Lamentin, Saint-Louis, Vieux-Fort et Bouillante. Le chef-lieu, Basse-Terre, rejetée dans un premier temps, l’a finalement obtenu. L’ensemble de ces plans représente 38,8 M€ dont 3,8 M€ pour Basse-Terre
En Guyane, Cayenne, Kourou, Mana, Matoury signent leur plan mais Macouria, Roura et Saint-Laurent du Maroni en sont exclus. Les prêts de restructuration de l’AFD se sont montés à 47,4 M€ et 7,5 M€ consentis par la Caisse des dépôts pour deux communes.