Négociations carburants à Bercy
Carburant : les négociations ont repris à Bercy
Rémunérations des capitaux, suppléments non cotés et contrats des gérants sont les points principaux de discussion entre le gouvernement et la filière pétrolière des DOM.
« On est satisfaits parce qu’on a été écoutés ! » Patrick Collé, président de l’intersyndicale des gérants de stations-service des DOM semblait apaisé à l’issue des quatre heures de réunion, hier au ministère de l’Economie et des finances à Bercy. Cette fois, pas de ministres autour de la table, mais le directeur de cabinet adjoint de Pierre Moscovici, Alexis Kohler en maître des lieux, et le directeur de cabinet de Victorin Lurel, Fabrice Rigoulet-Roze qui a conduit les débats. Un format et un lieu qui semblent avoir participé à dépassionner les échanges pour un débat serein. « Tous les problèmes ont été posés, selon M. Collé, et maintenant, il s’agit de nous mettre d’accord sur un calendrier de concertation pour régler les problèmes qui se posent. » Les arrêtés de méthode destinés à la fixation des prix des carburants ont été passés en revue, épluchés point par point. Les participants qu’ils soient gérants ou pétroliers, ont la sensation qu’il y a désormais une volonté manifeste de concertation. Et puis, les gérants ne semblent plus craindre les mesures de rétorsion de leurs fournisseurs et bailleurs. « Les pétroliers sont moins agressifs vis-à-vis de nous, poursuit M. Collé. La volonté de la filière est de trouver une solution de manière à préserver le système en place. » Cette fois, il y a eu de véritables contributions pour améliorer le contenu de ces arrêtés de méthode et des propositions d’amendement des textes. Ces amendements feront l’objet de réunions techniques spécifiques ultérieures (pour Mayotte par exemple).
Il existe encore trois points de blocages principaux. Le premier est annexe car il s’agit des relations contractuelles des gérants avec les pétroliers, un probleme en marge des décrets même si ces derniers y ont un impact certain. Une première réunion technique a d’ailleurs été consacrée à cela, hier dans la foulée de la première. Les deux autres clés de blocage sont la rémunération du capital a hauteur de 9 % pour la SARA et la question des suppléments non cotés (honoraires, assurances, frais de trading…) qui concernent la SARA comme la SRPP. C’est de ces deux paramètres que le gouvernement entend obtenir le « gras » de la baisse des prix à la pompe. Et pourtant, ces deux sujets n’ont pas été franchement abordés. A la sortie, les pétroliers, que ce soient Tanneguy Descazaud, directeur de la SARA, ou Mathieu Soulas, directeur de Total Océan indien, n’ont pas souhaité entrer dans les détails. Et pour cause, cela renvoie au sujet impopulaire de leurs profits… Les deux patrons pétroliers se sont contentés d’exprimer leur satisfaction de voir s’ouvrir « enfin une concertation présidée par le ministère de l’Economie ». « On a défini, ont-ils déclaré à l’unisson, un certain nombre de sujets pour lesquels des réunions supplémentaires seront organisées. » Leur apaisement serait encore plus grand si Victorin Lurel laissait entendre qu’il était prêt à ne pas ramener leurs profits au strict niveau de 2010 (20 millions pour la SARA contre 33 en 2012) pour leur en laisser un peu plus (environ 25 millions pour la SARA). Aux yeux du ministre des Outre-mer, rien ne semble s’opposer à ce que les arrêtés de méthode amendés puissent être signés au 1er février.
FXG, à Paris
Le pdg de Total entendu bientôt à l’Assemblée nationale
Dans le contexte actuel, l’annonce de l’audition de Christophe de Margerie, pdg de Total, mercredi prochain à l’Assemblée nationale, devrait susciter la présence de certains députés d’Outre-mer siégeant à la commission des affaires économiques. Si le patron de Total doit être entendu sur des sujets « nationaux », il devrait faire l’objet de questions spécifiques de leur part… En février 2012, Christophe de Margerie avait annoncé que son groupe avait réalisé en 2011 un bénéfice de 12 milliards d’euros.
Trois questions à Patrick Collé, président de l’intersyndicale des gérants de stations-service des DOM
« Ce décret n’est pas un instrument de baisse »
Quelle conclusion tirez-vous de cette réunion ?
Aujourd’hui, nous pouvons dire de manière très claire que le prix des carburants à la pompe ne va pas baisser. Ce décret n’est pas un instrument de baisse. Il faut dire la vérité aux populations domiennes. Nous ne sommes pas contre la transparence, ni contre le nouveau décret, mais il faut prendre le temps de l’analyse parce qu’il peut y avoir un déséquilibre capable de pénaliser certains acteurs de la filière et, notamment, les gérants.
A-t-il été question lors des discussions de 9 % de rémunération du capital pour les pétroliers ?
Nous avons discuté… Alors, c’est vrai qu’ils ne sont peut-être pas d’accord par rapport à cela, mais ils en ont pris acte pour pouvoir en discuter. C’est une bonne chose. Auparavant, il n’y avait pas de discussion, pas de concertation. Tout ce qui s’est passé auparavant n’est pas sérieux. Face aux attaques, nous nous sommes défendu. On ne fait pas de politique, on se défend ! Un gérant de station-service ne ferme pas son entreprise comme ca, à la légère. Lorsqu’on ferme son entreprise, on perd de l’argent ! Pour nous, ce dossier n’as pas été géré correctement par le ministère des Outre-mer.
Qu’attendez-vous désormais ?
Alors que le président de la République parle d’un pacte de responsabilité vis-à-vis des entreprises, il y a comme un probleme au niveau de la méthode. Nous nous tournons résolument vers l’avenir et nous souhaitons que les problèmes que nous avons posés soient résolus et, notamment, le problème des relations contractuelles avec les compagnies pétrolières.
Propos recueillis par FXG
Trois questions à Gérard Lebon, president des gérants de stations-service de la Réunion
« Le texte est trop contraignant »
Avez-vous le sentiment que les choses se présentent mieux cette fois ?
Manifestement, les débats sont plus apaisés, plus sereins. On a le sentiment que la confiance est train d’etre rétablie entre les différents partenaires.
Peut-on encore parler d’une pression des pétroliers sur les gérants ?
Les pétroliers n’ont pas la capacité de faire pression sur nous ; on est capable de faire des grèves contre des gouvernements ; on est capable de faire des grèves contre nos pétroliers aussi.
Quels sont les problèmes que vous pose l’application du décret et de l’arrêté de méthode ?
Globalement, on nous proposé un texte qui n’est pas applicable matériellement sur le terrain, avec des contraintes qui font que l’objectif visé ne peut pas être atteint. Le texte est trop contraignant dans sa rédaction et dans les conditions qu’il met en avant. Donc nous disons qu’il faut revoir ce texte, le remettre à plat. L’ambition de transparence et la volonté de limiter les hausses de prix à la pompe sont partagées par les gérants, parce que, effectivement, moins le prix est haut, plus on consomme. Et je pense que dans un système administré, on doit de la transparence aux clients. Depuis 2008, nous travaillons déjà sur la transparence avec l’observatoire des prix. On n’a aucun probleme avec ca, mais on dit que le texte soit applicable. Nous pointons donc du doigt les éléments qui posent probleme pour l’application du texte. J’ai l’impression qu’on veut y mettre de la bonne volonté donc ca ira vite.
Propos recueillis par FXG