Egalité réelle outre-mer
Le projet de loi égalité réelle outre-mer a été présenté au conseil des ministres du 3 août par GPL et Ericka Bareigts. Entretien avec la ministre des Outre-mer.
George Pau-Langevin, ministre des Outre-mer
"Je ne conçois pas une loi de cette importance sans consulter les personnes concernées"
L’Egalite réelle outre-mer, c'est pour quand officiellement ?
L’égalité réelle, c’est une ambition de long terme pour nos Outre-mer. Il s’agit d’un processus qui se construit dans le temps, avec un horizon de 10 à 20 ans selon les territoires pour achever la convergence dans les domaines qui sont les plus importants pour nos concitoyens : l’éducation, la santé, le logement, les infrastructures, l’emploi, la compétitivité des entreprises.
Cette démarche passe non seulement par une logique de rattrapage mais surtout par la promotion de nouveaux modèles de développement pour chacun des territoires, qui permettent de valoriser leurs atouts et leurs richesses pour en faire des pôles de rayonnement dans leur environnement régional. En cela, elle questionne notre conception du développement qui a trop longtemps consisté à chercher seulement à combler les besoins de nos régions sans s’intéresser à leurs potentialités. Cette ambition se traduira dans l’élaboration des plans de convergence.
Depuis le début du quinquennat, nous travaillons à la mise en œuvre de politiques publiques en faveur de l’égalité réelle sans qu’elles aient été présentées comme telles. Je pense notamment au plan logement Outre-mer, au plan jeunesse Outre-mer, au plan sécurité Outre-mer etc. Le projet de loi vient donner un horizon commun à toutes nos initiatives, en permettre une appropriation plus large par les citoyens et en favoriser l’amplification.
Quand les plans de convergence seront-ils fixés pour chaque territoire ?
Les plans de convergence, c’est la rencontre des volontés de l’Etat et celles de chacune des principales collectivités pour déterminer la trajectoire vers l’égalité réelle qui sera propre à un territoire, une population, un environnement économique et social donné. Les plans de convergence seront donc élaborés suite à l’adoption de la loi suivant un calendrier fixé avec les élus des différents territoires. Un travail pédagogique sera réalisé en amont de leur élaboration pour expliquer précisément en quoi ils consistent, ce qu’ils contiennent et comment ils s’articulent avec les autres documents de planification à l’échelle locale.
Une autre étape préalable à l’élaboration formelle de ces plans consistera en la définition des indicateurs de l’égalité réelle pour que la société civile et les socio-professionnels puissent décider de la manière de mesurer les progrès réalisés en matière de développement au regard de leurs préoccupations et de leurs priorités.
Comment seront-ils établis ? Les citoyens auront ils leur mot à dire ?
Les plans de convergence ne pourront pas politiquement être conçus sans une consultation des acteurs de la société civile. L’ambition est bien d’associer le plus possible nos concitoyens à cette démarche car je crois que leur adhésion à un projet de territoire partagé est une condition de succès pour le développement de nos Outre-mer. Ce sont eux qui mettront en mouvement nos territoires et qui construiront au quotidien les solutions de la convergence. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai tenu à organiser une consultation participative.
Pourquoi une consultation participative ? En quoi va-t-elle consister ?
C’est une démarche inédite : Nous allons consulter l’ensemble des territoires (11 territoires, 2,75 millions d’ultramarins, sans compter les ultramarins de l’hexagone qui sont bien sûr également concernés), sur un même sujet et au même moment. A part pour une élection, aucune consultation n’aura sollicité les populations d’outre-mer de la sorte.
Je ne concevais pas une loi de cette importance, inscrite dans la durée (à vocation « programmatique ») sans consulter les personnes concernées.
L’égalité réelle c’est l’affaire de tous. Les associations, les parlementaires, les élus, les entrepreneurs, les étudiants, les retraités doivent s’approprier le sujet et contribuer à son cheminement. Cette campagne va permettre d’intégrer la multiplicité des outre-mer dans une loi qui va défendre l’unité de la Nation. L’objectif de cette consultation est de favoriser l'émergence d'une définition collective de l’égalité réelle Outre-Mer, de définir les critères qui permettront d’apprécier si l’égalité réelle entre l’Hexagone et les territoires ultramarins progressent dans le sens souhaité. Comment conçoivent-ils l’égalité réelle ? Qui en sont les acteurs, Quels en sont les objectifs et quelles réalisations peuvent y contribuer ? Quelles sont leurs propositions pour assurer cette égalité réelle ?
Quelles sont les principales mesures économiques et sociales des titres 2 et 3 ? cela peut-il encore évoluer ?
Les principales mesures sociales concernent en premier lieu Mayotte compte-tenu des écarts avec l’Hexagone en termes de prestations servies sur le territoire mahorais. Nous avons engagé une démarche de convergence dans le cadre de Mayotte 2025. Avec le projet de loi, nous accélérons le calendrier et allons plus loin dans cette logique. Nous engageons également avec ce texte la structuration du système de retraite à Mayotte.
Concernant les mesures économiques, elles s’attachent à promouvoir l’égalité réelle en matière d’accès aux opportunités économiques et à l’initiative entrepreneuriale. Certaines concernent la continuité territoriale pour favoriser les mobilités entre les territoires ultramarins et l’Hexagone dans le cadre d’un parcours de formation. Le développement des compétences constitue le fondement même de l’égalité réelle car il permet aux citoyens d’accéder à des nouvelles opportunités économiques et de mobiliser pleinement l’ensemble de leurs droits. D’autres mesures favorisent le renforcement de la concurrence pour initier une diminution des prix et accroître le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
C'est tout ?
Je l’ai rappelé devant le CESE, la démarche d’égalité réelle est un processus qui se construit dans le temps. Elle ne se décrète pas d’un claquement de doigts. Ainsi, il serait utopique de penser que nous réglerons une fois pour toutes par une loi cette question. Au contraire, conformément aux engagements du Premier ministre, le projet de loi qui a été présenté au conseil des Ministres est d’abord une loi de programmation qui définit des principes, une méthodologie et des outils pour initier cette démarche de long terme. Ce n’est que la première pierre d’une longue construction. Il ne s’agit par conséquent pas de faire un catalogue exhaustif de mesures économiques et sociales ; elles seront enrichies très rapidement par les éléments inscrits dans les plans de convergence.
Propos recueillis par FXG, à Paris