Le Sénat auditionne Gabriel Serville
Gabriel Serville explique au Sénat le projet d’évolution statutaire
Dans le cadre de son étude sur l'évolution institutionnelle des outre-mer, la délégation sénatoriale aux Outre-mer a auditionné mardi 25 octobre Gabriel Serville, le président de la CTG.
L’audition du président de la CTG intervient moins d’une semaine après qu’a débuté avec le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer et son ministre délégué un dialogue de co-construction en vue de l’élaboration d’un statut spécifique de la Guyane. C’est ce travail qui doit se poursuivre jusqu’en 2024 qu’est venu expliquer le président Serville aux sénateurs.
Après 64 ans de revendications, la voix des Guyanais commencerait-elle à être entendue ? En 2018, alors que le président Macron envisageait une réforme constitutionnelle, Gabriel Serville proposait que la Guyane fasse l’objet d’une inscription dans la Constitution au sein d’un article qui lui serait spécialement dédié. C’est cette idée qui a été reprise par le congrès des élus guyanais réunis le 22 mars dernier. Faisant suite à l’Appel de Fort-de-France le 7 septembre dernier, Emmanuel Macron a indiqué qu’en matière d’évolution institutionnelle, il n’y aurait pas de tabou, que l’actuel logiciel avait montré ses limites, qu’il était même caduc et qu’il ne fallait donc pas craindre de faire évoluer le cadre. A ce titre, Gérald Darmanin a réaffirmé à la délégation guyanaise venue le voir le 19 octobre dernier qu’à la faveur de la réforme constitutionnelle que va nécessiter la Nouvelle-Calédonie, une fenêtre de tir serait ouverte en 2024. D’ici cette date et même d’ici la fin 2023, la Guyane devra avoir achevé le travail : le projet constitutionnel (un titre 9 bis qui lui serait propre à l’instar de la Nouvelle-Calédonie), une loi organique pour ses futures institutions et la consultation préalable de la population guyanaise. Un comité́ de pilotage pour le processus d’évolution statutaire que préside le vice-président Aron a déjà commencé de travail de co-construction avec le gouvernement. « L’évolution est inévitable, a insisté le président Serville, eu égard aux défis régionaux et internationaux, aux enjeux climatiques et migratoires. » La Guyane envisage donc d’être un pays autonome. « L’autonomie, précise le président de la CTG, c’est la capacité à se forger ses propres lois, ses propres règles et ses propres valeurs. » Ce projet, hors du cadre des articles 73 ou 74 de la Constitution, ne signifie pas la fin du statut communautaire de RUP, c’est même un garde-fou tant les crédits européens sont essentiels. La situation de grande autonomie des régions européennes des Açores, Madère et des Canaries tend à soutenir cette hypothèse. Le comité de pilotage s’intéresse d’ores et déjà aux territoires de la Polynésie française, de la Corse, de Saint-Barthélemy, de la Nouvelle-Calédonie mais également de la Sardaigne pour tirer des enseignements du fonctionnement institutionnel de ces territoires.
Quant à la population dont l’adhésion est une condition sine qua non, Gabriel Serville estime qu’un large consensus est en train de se dessiner. Une cellule communication va voir le jour. Elle aura pour mission d’expliquer aux électeurs ce qui signifiera pour eux cette autonomie.
FXG
L’accompagnement financier de l’Etat
La question institutionnelle n’exclut pas la question de l’accompagnement de la Guyane par l’Etat. « C’est le principal sujet de discussion avec le ministère des Outre-mer, a indiqué le président Serville, car l’évolution statutaire ne nous exonère pas de travailler à l’amélioration de nos finances dans le cadre de la contractualisation qui a été mis en place entre l’Etat et la CTG. L’Etat n’a pas un langage assez clair sur l’appui qu’il entend porter dans le cadre du prochain contrat de convergence et de transformation pour tout ce qui concerne l’aménagement du territoire et notamment les routes. » Le président de la CTG regrette une déconcentration mal menée au niveau des réseaux routiers : « L’Etat confie aux régions ses compétences sans transferts financiers et garde les axes stratégiques. Nos routes nationales ressemblent à des chemins vicinaux ! » De même Gabriel Serville regrette que l’ARS ne veuille pas lâcher ses crédits en matière de lutte antivectorielle dont la compétence revient à la CTG… Sans même parler du foncier de l’Etat et de la liste sans fin des sujets dont l’absence de maîtrise par la CTG empêche toute évolution favorable.