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Publié par fxg

Les ministres d'Etat Borne et Valls dans les jardins de la rue Oudinot (photos Alfred Jocksan)

Les ministres d'Etat Borne et Valls dans les jardins de la rue Oudinot (photos Alfred Jocksan)

« Réparer notre histoire ! »

De hautes autorités de l'Etat se sont associées aux militants de la mémoire antillais pour l'hommage national aux 4 millions de victimes de l'esclavage colonial français, célébré chaque année le 23 mai. Le combat pour les réparations, symboliques et mémorielles, demeure d'actualité.

« Je sais ce que c'est que d'être esclave. » C'est avec les mots de Mary Prince - une femme née sous le joug aux Bermudes en 1788 - déclamés de façon poignante par l'immense artiste et comédienne martiniquaise Adèle Souria, que s'est ouvert l'hommage national du 23 mai. Sous un soleil éclatant, dans les jardins du ministère des Outre-mer – anciennement ministère des Colonies, n'a pas manqué de rappeler l'actuel locataire des lieux, Manuel Valls – la cérémonie en mémoire des 4 millions de victimes de l'esclavage colonial français combinait performance artistique et pompe républicaine.

« Commémorer le 23 mai, c'est rendre justice à celles et ceux que l'on a traité comme des marchandises, s'est ému le ministre des Outre-mer dans son discours. Cette date célèbre aussi la mobilisation, 150 ans après le décret d'abolition de Schoelcher, pour faire reconnaître l'esclavage comme un crime contre l'humanité. La loi de Christiane Taubira est une réparation symbolique, culturelle, morale, elle a permis d'enseigner cette histoire même s'il nous reste encore beaucoup de chemin à faire pour déraciner l'arbre de l'esclavage. »

Dans des allusions presque subliminales à la vie chère, aux conséquences économiques de l'asservissement et de « l'économie de comptoir », Manuel Valls a profité de son discours au ministère des Outre-mer pour appeler à continuer le combat mémoriel.

Messe à la basilique Saint-Denis

Un peu plus tard, la journée nationale de commémoration s'est poursuivie à Saint-Denis, sous un même soleil radieux. Une messe-hommage a été donnée à la basilique où reposent des rois de France qui ont largement profité du commerce triangulaire. Élus locaux ceints de leur écharpe tricolore, parlementaires, préfets et membres du gouvernement se sont succédés au pied de la stèle sculptée par Nicolas Cesbron, une sphère métallique qui porte les noms de 213 esclaves émancipés.

« La marche du 23 mai 1998 a été un point de départ pour nous mais aussi pour la République, s'est souvenu Emmanuel Gordien, président du Comité de la marche de 1998 (CM98). Comment est-il possible que 40 000 personnes aient défilé en hommage à des personnes qu'ils ne connaissaient pas ? Parce que nous ne parlions pas de l'esclavage, nous n'en parlions jamais. Depuis, nous sommes devenus des spécialistes de la généalogie ! »

Combat mémoriel citoyen

Présidente d'une autre association mémorielle, l'association Sonjé, Guylène Mondor s'est demandée « comment assumer ce crime contre l'humanité ? En commençant par nommer ces personnes, parce que nous sommes, parce qu'elles ont été. Victimes, oui, mais surtout résistants ! »

Les combats contemporains et la lutte de chaque jour pour la dignité étaient aussi dans la parole d'Aissata Seck, directrice de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage (FME). « Alors que l'économie fonctionne toujours selon les principes et les règles imaginées par Colbert, non, la lutte n'est pas encore achevée, nous devons travailler encore ! Il faut commencer par réparer notre histoire ! », exhortait-elle lors de sa prise de parole.

Un discours qui faisait écho aux dizaines de curieux et militants mémoriels, participants au « village du 23 mai », installé par le CM98 au pied de la basilique. Ateliers généalogiques, exposition temporaire et stands militants ont permis à plusieurs dizaines de personnes de nouer un lien concret avec la mémoire de la traite et du commerce triangulaire. La journée nationale d'hommage aux victimes de l'esclavage colonial s'est terminée par une ronde des tambours rassemblant des musiciens et des sonorités venues de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane et de La Réunion.

FA Paris

Les scolaires au premier rang de la transmission

La ministre de l'Éducation, ancienne Première ministre, Elisabeth Borne, a remis les prix du concours « Flamme de l'Égalité ». Co-organisé par la Fondation pour la mémoire de l'esclavage (FME) et les ministères de l'Éducation, des Outre-mer et de l'Agriculture, ce concours annuel s'adresse à un public scolaire. Il avait pour thème cette année : « Résister à l’esclavage : survivre, s’opposer, se révolter ». 2700 classes ont participé cette année. « L'année prochaine, le thème sera « Femmes en esclavage », a annoncé la ministre de l'Éducation. « Le système esclavagiste était rendu plus cruel encore pour elle, du fait de leur genre. »

Le mur des noms au Trocadéro

Serge Romana, coprésident du comité de pilotage du mémorial national des victimes de l'esclavage, commence à s'impatienter. « J'espère que nous pourrons inaugurer le monument portant les noms de 230 000 esclaves avant 2027, a-t-il déclaré. Ce monument sera un lieu de transmission et d'enseignement. » Promis dès l'année 2018 par le président de la République, Emmanuel Macron, cette stèle gravée du nom d'esclaves de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane et de la Réunion, tarde à voir le jour. Chaque 23 mai est l'occasion de renouveler des promesses à ce sujet. Le président Macron a posté un message sur le réseau social X pour révéler que le projet retenu par le comité de pilotage a été conçu par l’équipe composée du paysagiste Michel Desvignes et de l’Agence d’Architecture Philippe Prost. « Ce projet, a-t-il détaillé, propose un jardin mémoriel, un lieu de calme, de recueillement et de partage, où seront inscrit les noms de 224 000 Nouveaux libres. »

 
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