La double-dette d'Haïti à l'Assemblée nationale
Une résolution enjoint au gouvernement de rembourser la double dette d'Haïti
Les députés ont adopté jeudi 5 juin une résolution qui enjoint le gouvernement « à reconnaître officiellement et solennellement l’injustice infligée » mais aussi à « prendre en considération des demandes de remboursement et à étudier le processus de restitution de la double dette imposée à Haïti ».
« En 1825, ce qui est demandé, c'est rien de moins qu'une rançon, rappelle le député (GDR) de Martinique, Marcellin Nadeau, lors de la niche parlementaire de son groupe, une rançon que la première république noire ne peut pas payer mais qu'elle est obligé d'accepter sous la menace d'un blocus et de cinq-cents canons ! » En jeu, une proposition de résolution « visant à la reconnaissance, au remboursement et à la réparation par la France de la double dette d’Haïti ». L'économiste Thomas Piketty estime cette dette à plus de 300% du PIB haïtien. La jeune république a du contracter des emprunts pour échelonner sa dette qu'elle aura réglée intégralement au milieu XXè siècle. « Cette double dette n'a servi n'a rien d'autre qu'au financement du capitalisme français.», achève de plaider l'élu préchotin.
Le Rassemblement national (RN) a exprimé d'emblée sa vive opposition. « La repentance infinie ne mène nulle part », s'est écrié Emeric Salmon, député de la Haute-Saône, selon qui cette résolution risque de créer un précédent : « D'autres nations pourraient demander des réparations similaires, déstabilisant l'ordre politique et financier mondial. »
« Nous reviendrons, lui a répondu Max Mathiasin (LIOT Guadeloupe). Nous reviendrons bientôt, nous Antillais, pour parler de l'abrogation du Code noir ! Nous ne manquerons pas de revenir sur l'indemnisation des colons à l'abolition de l'esclavage, des sommes que l'on devrait reverser à la Réunion, aux Antilles et à la Guyane. »
Béatrice Bellay (PS, Martinique) n'a pas caché son émotion « en tant que caribéenne et en tant qu'ultramarine » : « La France a reconnu ses fautes mais toujours évité les réparations. Il s'agit pour l'Assemblée nationale de montrer sa volonté de rompre avec l'impunité mémorielle. »
59 pour, 9 contre et 3 abstentions
Le gouvernement, représenté par le ministre de la Francophonie, le mahorais Thani Mohamed Soilihi, ne s'est pas opposé au texte. Non sans avoir rappelé que « le président Emmanuel Macron a engagé un processus de réparation envers Haïti à l'occasion du Bicentenaire de la double dette et annoncé la mise en place d'une commission mixte d'historiens », il s'en est remis à la « sagesse » de l'Assemblée.
L'Assemblée a adopte cette résolution par 59 voix pour et 9 voix contre. Les sept députés RN présents ont voté contre, comme les deux membres présents de la droite ciottiste. Le groupe de Droite républicaine n'a pas pris part au vote. Les quatre Modem présents dont le Saint-Martinois Frantz Gumbs ont voté pour, comme leurs trois collègues du groupe Horizons & Indépendants. Chez les Macronistes d'EPR, trois se sont abstenus, une a voté pour. Le seul député présent du groupe LIOT (Max Mathiasin) a voté pour. A gauche tous les groupes ont soutenu la résolution dont Steevy Gustave (Écologiste et Social, dix présents), Jean-Victor Castor, Émeline K/Bidi, Karine Lebon, Frédéric Maillot, Marcellin Nadeau et Davy Rimane (GDR, seize présents), Jean-Philippe Nilor (LFI, douze présents), Béatrice Bellay et Elie Califer (PS, six présents).
FA Paris