Mémoire de Jaspora
Stéphanie Melyon-Reinette enquête sur la « Jaspora »
« Mémoires de Jaspora » aux Editions Persée de Stéphanie Melyon-Reinette, préface de Mémona Hinterman.
« Mémoires de Jaspora » est un recueil d’entretiens menés avec des membres de la diaspora haïtienne ayant eu une expérience de vie en Amérique du Nord (aux Etats-Unis principalement [New York City et/ou Miami] et au Canada). On y retrouve des témoignages d’artistes (Jeanguy Saintus, Buyu Ambroise, Sabine Blaizin...), d’écrivains (Dany Laferrière par exemple), d’éducateurs, d’enseignants, notamment ceux qui travaillent à l’intégration des jeunes Haïtiens dans les écoles bilingues (créole/anglais) et qui œuvrent à lutter contre les discriminations qui leur ont été ou qui leur sont encore faites, d’activistes (Jocelyn Mc Calla, Jocelyne Mayas), de femmes politiques (Rosemonde Pierre-Louis), ou encore d’universitaires et sociologues. Ils donnent leurs points de vue personnels et aigus sur la vie d’un Haïtien aux Etats-Unis face à la racialisation ou l’ethnicisation de ce pays, face aux discriminations...
C’est par ces lignes que Stéphanie Melyon-Reinette a souhaité suscité un intérêt à la lecture de son ouvrage consacré à la diaspora haïtienne, « pas tout à fait outre-mer au sens administratif, mais caribéenne tout de même », précide-t-elle car si elle sait que Haïti ne fait plus l’actualité (entre les présidentielles, la Syrie, etc…), elle n’en pense pas moins que la grande île francophone fera toujours l’actualité : « C’est une cause intemporelle et un sujet – me semble-t-il – inépuisable. »
FXG (agence de presse GHM)
Le témoignage de Dany Laferrière
« J’ai passé ma vie à éviter d’être nommé. Mais si les gens veulent me nommer, y’a pas de problème ! C’est leur affaire. Mais pour moi, je suis d’abord un individu, et puis…et puis je vis ma vie ! Et puis…dans cette vie-là, on est nommé tout le temps…à tous les secteurs, à tous les carrefours…si on vit en province, on est un provincial. Si on vit à Port au Prince, si on vient de tel quartier…enfin on est nommé…Si on arrive à Montréal, on est un immigrant…Si on arrive en Haïti, on est un diaspora(jaspora)…des choses comme ça ! Si on est un écrivain, on n’est pas quelqu’un qui écrit…on est un écrivain haïtien, on est un écrivain immigrant, ou un écrivain noir, ou un écrivain exilé…donc y’a toujours des dénominations ! [… ] Moi je suis obsédé par l’idée d’ « individu ». Parce que je viens d’une culture du « nous », je suis obsédé par le « je », comment le « je » peut rentrer dans le « nous », comment le « je » peut sortir aussi du « nous », sortir de ce « nous » collectif. C’est l’appropriation du « je », de sortir de ce « nous » collectif, prendre des décisions personnelles et non de race, et non de nationalité, et non de classe sociale. Même si toutes ces choses-là me forment, sont mes composantes.»