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Publié par fxg

Me Eddy Arneton au tribunal judiciaire de Paris le 27 mars dernier

Me Eddy Arneton au tribunal judiciaire de Paris le 27 mars dernier

Eddy Arneton jugé pour diffamation envers une procureure

Mis en cause devant le tribunal de Paris par une ancienne magistrate du parquet de Fort-de-France alors qu'il défendait Keziah Nuissier, Me Eddy Arneton a fait de son procès pour diffamation une tribune contre les violences policières et pour la liberté d'expression.

« La famille du Droit lave son linge sale en public ! » La formule est de Me Karim Beylouni, avocat de la partie civile : c'est probablement la meilleure manière de résumer cette singulière audience de la 17e chambre correctionnelle du tribunal de Paris, spécialisée dans les délits de presse.

Jeudi 27 mars, dans une salle d'audience trop petite pour ses nombreux confrères et les militants anti-chlordécone venus manifester leur soutien, Me Eddy Arneton est jugé pour « diffamation publique envers un agent public ». En 2020, la procureure adjointe de Fort-de-France, Karline Bouisset a porté plainte contre l'avocat martiniquais. Elle lui reproche d'avoir dénoncé l'attitude du parquet et de la police envers le jeune Nuissier, lors d'une conférence de presse et dans deux articles parus en novembre de la même année sur le site internet de Martinique la 1ère et dans France-Antilles.

À l'époque, Me Arneton annonçait avoir saisi l'Inspection générale de la justice, dénonçait « des faux en écriture publique » et le fait que le jeune militant anti-chlordécone, frappé par les policiers lors de son interpellation, « saignait de la tête » lors d'une audition par un magistrat du parquet.

« Keziah Nuissier se fait maltraiter, torturer, resitue Me Arneton, appelé à la barre pour justifier les propos qu'il a tenus. On lui écrase les testicules à coups de bottes, on le traite de sale nègre. À quelques jours de l'audience, nous faisons face à une avalanche de communications de la part du procureur de la République. On avait traité Keziah Nuissier de délinquant. C'était mon devoir d'interpeller l'opinion publique à ce moment-là. Avec le bâtonnier Constant, nous voulions lancer l'alerte sur de graves dysfonctionnements. Cette affaire me dépasse, elle dépasse la juridiction : en fait tout ça s'inscrit dans la problématique du chlordécone ! »

"Base factuelle" et relaxe

Fait inhabituel, dans un procès qui ne l'est pas moins puisqu'il oppose ministère public et défense, le parquet n'a pas requis dans un sens particulier : « À l'analyse des pièces, vous déciderez si Me Arneton avait la base factuelle pour tenir ces propos. Dans ce cas, ce sera une relaxe. Sinon, vous entrerez en voie de condamnation. Il y a des vases communicants entre la base factuelle et les droits de la défense ».

Partie civile au procès, la plaignante estime qu'Eddy Arneton mérite d'être condamné : « J'ai été salie ! Jamais je n'aurais imaginé que moi, magistrate, je porterais plainte contre un avocat, s'est-elle indignée d'une voix émue à la barre. J'ai fait tout mon possible et on m'a accusé dans la presse d'avoir couvert des faux, sans preuve ! Il a affirmé que j'ai laissé un homme se vider de son sang devant moi, je suis meurtrie ! »

Défendu, entre autres, par les avocats François Saint-Pierre et Philippe Edmond Mariette, Eddy Arneton mise avant tout sur la démonstration de sa « bonne foi », tout en déniant partiellement s'être adressé à la presse. Ses avocats ont  insisté sur le contexte des fortes tensions à l’œuvre dans la société martiniquaise. « Il y avait une révolte sociale en Martinique et dans les Outre-mer, des luttes mémorielles et des déboulonnages de statues, rappelle lors de sa plaidoirie Me Saint-Pierre. La véritable question est de savoir si à l'avenir les avocats pourront toujours s'exprimer dans les médias sans crainte de poursuite. La décision que vous allez prendre est d'une importance cruciale sur le plan démocratique, c'est pourquoi vous ne pourrez que le relaxer ! », concluait le défenseur. L'affaire a été mise en délibéré au 28 mai prochain.

FA Paris

Une des affaires dans l'affaire

Ce procès en diffamation n'est qu'une des facettes de l'affaire Keziah Nuissier, le jeune Martiniquais, tambouyé et militant anti-chlordécone battu par les policiers en juillet 2020. En décembre prochain, il doit être jugé pour violences envers les forces de l'ordre. C'est la seule audience attendue dans ce dossier, pour l'instant : Keziah Nuissier et ses avocats sont toujours dans l'attente de la tenue d'un procès des policiers qui l'ont frappé. Plusieurs plaintes sont pendantes devant les juridictions de Martinique, Cayenne et Paris.

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