Souria Adèle dépote sur scène
Marie-Thérèse Barnabé, négresse de France
Souria Adèle, comédienne martiniquaise, doit commencer son spectacle à 20 h 30. Elle n’est pas là et c’est sa tante, Marie-Thérèse Bernabé, une plantureuse sexagénaire qui monte sur scène pour faire patienter le public. Une heure d’attente qui lui laisse le temps de conter les difficultés d’une Antillaise qui cherche à pénétrer le monde du show biz.
Souria est née en Algérie en 1961 de parents martiniquais. Elle débarque à Paris à l’âge de deux mois et passe son enfance à Bagneux avec des vacances tous les quatre ans en Martinique… Elle commence la danse africaine vers 13 ans et découvre les grands ballets d’Afrique noire, puis elle s’initie au jazz avec Mat Mattox. Elle accompagne des artistes (Nino Ferrer, Julien Clerc), fait de la télé, des galas, du music hall. Elle joue Joséphine Baker. A 28 ans, la naissance de son fils interrompt ce début de carrière. Elle travaille sa voix et découvre le plaisir de chanter du gospel. Puis, elle revient sur les planches avec Jérôme Savary à Chaillot dans l’Irresistible ascension d’Arthuro Hui, puis on la voit dans une comédie musicale Barnum qui lui fait découvrir la voix parlée. C’est le coup de foudre pour la comédie. Elle décroche un rôle récurrent dans Profession infirmière sur M6. Elle se rend compte alors que « même dans l’audiovisuel, il y a du racisme. A M6, on m’a dit : pour une personne de couleur, vous devriez être contente ». Les désillusions arrivent : « Il y a très peu de castings pour les non-blancs et les rôles sont souvent inintéressants… » Un stage d’écriture théâtrale plus tard, elle prend conscience de l’importance de la plume et va se servir d’elle-même comme matière théâtrale, ce sont les débuts de Marie-Thérèse Barnabé qui vont lui permettre de vivre de son art alors qu’elle était prête à renoncer. En Avignon, Souria Adèle a rencontré des programmateurs intéressés qui vont lui permettre de sortir son spectacle de Paris et de la banlieue pour faire connaître à la province française l’histoire d’une négresse de France… Les standing ovations que le public avignonais lui ont offert ne l’empêchent pas de penser au combat qu’elle mène pour imposer le créole au bac avec Tony Mango et Igo Dranè.